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SRAS, infections émergentes et préparation au bioterrorisme
Stephen G Weber, Dr,a,* Ed Bottei,c Richard Cook,b et Michael O’Connorb
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/ar...
La réponse à l’épidémie de syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) de 2002-2003, bien qu’efficace, a été entravée par la confusion initiale sur l’identité de l’agent pathogène responsable1, l’incertitude sur l’épidémiologie de la transmission et de la propagation2, et les difficultés de circulation de l’information dues aux rivalités politiques.3 La récurrence de l’épidémie de SRAS à Toronto a mis en évidence les difficultés potentielles à contenir des épidémies similaires d’organismes peu familiers et hautement contagieux.4
Les maladies naturelles telles que le SRAS sont riches d’enseignements pour la préparation à la dissémination délibérée d’agents biologiques par des terroristes. Mais la relation entre les infections naturellement émergentes et le bioterrorisme présente un aspect plus sombre. Alors que les cliniciens et les décideurs politiques considèrent les maladies comme le SRAS comme des menaces pour la santé publique, les terroristes pourraient les voir comme des armes d’opportunité.
Le coronavirus associé au SRAS présente plusieurs caractéristiques qui pourraient être particulièrement intéressantes pour ceux qui recherchent une arme biologique (tableau ). L’agent pathogène du SRAS est très contagieux. Parmi les professionnels de la santé qui ont été exposés sans protection aux premiers cas de SRAS en Asie, plus de 50 % sont tombés malades.5 Si le SRAS était disséminé au sein d’une population sensible, il pourrait proliférer largement avant que des mesures de confinement ne soient mises en œuvre. Une répartition géographique bien définie des cas a été essentielle à l’identification des cas suspects de SRAS lors de l’épidémie de 2002-2003. Une distribution plus large pourrait retarder l’identification, ce qui rendrait difficile le contrôle de la propagation de l’infection.
La létalité fait également du coronavirus du SRAS un agent bioterroriste viable. Au cours de l’épidémie de 2002-2003, le taux de mortalité dû au SRAS a dépassé 40 % chez les personnes âgées et affaiblies.6 Le SRAS a également tué des personnes jeunes et par ailleurs en bonne santé. Le profil démographique des travailleurs de la santé décédés du SRAS est comparable à celui du personnel militaire. Le coronavirus du SRAS peut donc être utilisé comme une arme ciblant les unités militaires. En outre, la convalescence prolongée des personnes ayant survécu à l’infection par le SRAS mettrait encore plus à rude épreuve les ressources de la nation ou des unités militaires attaquées7.
Contrairement à la variole, l’accès au coronavirus du SRAS n’est pas fortement restreint ; il est concevable que le virus puisse être obtenu dans la nature. De nombreux décès dus au SRAS au cours de l’épidémie de 2002-2003 ont eu lieu dans des régions du monde où la sécurité des dépouilles n’est pas garantie. Par conséquent, plusieurs pays ont accès à des spécimens à partir desquels de grandes quantités de coronavirus du SRAS pourraient être cultivées. En outre, le virus pourrait être obtenu à partir des espèces animales qui semblent être ses réservoirs naturels.
La caractéristique la plus alarmante du coronavirus du SRAS en tant qu’arme biologique potentielle est sans doute la difficulté de détecter une attaque. La détection de l’épidémie de 2002-2003 a été facilitée par une distribution géographique limitée, résultant de la propagation du virus à partir d’un foyer unique. En revanche, une attaque délibérée serait probablement conçue pour propager le virus et entraînerait une prolifération de nouveaux cas dans une vaste zone. Ainsi, la possibilité d’endiguer l’épidémie et de suivre une piste médico-légale pour identifier les responsables serait probablement perdue.
Les ressources consacrées à la compréhension du SRAS et à la prévention d’une autre épidémie naturelle ont été généreuses et apparemment efficaces. La prévention d’une épidémie délibérée sera plus difficile. Outre la mise au point de meilleurs traitements et de stratégies d’endiguement du SRAS, il convient de s’attaquer aux facteurs qui font du coronavirus du SRAS une arme biologique potentielle.
L’accès aux échantillons à partir desquels le coronavirus du SRAS et d’autres agents pathogènes émergents peuvent être isolés et transformés en armes doit être limité. Une documentation appropriée et une chaîne de conservation sûre, qui font défaut dans la plupart des établissements de soins de santé et sont absentes de nombreux plans de préparation, doivent être renforcées et appliquées aux échantillons cliniques, aux patients malades et aux dépouilles des personnes décédées. Ces mesures viendront compléter les efforts visant à réduire la probabilité d’accidents de laboratoire impliquant le coronavirus du SRAS.8 Il est peut-être également temps de reconsidérer les normes actuelles de partage des informations techniques sur les agents pathogènes émergents. La diffusion de la séquence génétique du coronavirus du SRAS pourrait faire progresser la recherche sur les contre-mesures, mais elle pourrait aussi aider ceux qui veulent nuire. Il est nécessaire de renforcer la responsabilité en matière d’accès à ces informations. Les communautés scientifiques et cliniques devraient orienter la structure et l’application de ces réglementations.
Les systèmes actuels destinés à détecter l’apparition d’infections naturellement émergentes peuvent être d’une utilité limitée pour détecter la propagation délibérée du coronavirus du SRAS et d’agents similaires, et doivent être renforcés - par exemple, les détecteurs automatisés d’agents pathogènes aéroportés peuvent ne pas identifier les porteurs humains intentionnellement infectés par le coronavirus du SRAS. De même, la surveillance syndromique pourrait passer à côté des indices indiquant qu’une attaque au coronavirus du SRAS est en cours, en particulier si la surveillance est de portée limitée ou n’est pas déployée à proximité du lieu de l’attaque9. La diffusion à grande échelle d’un test de diagnostic rapide et validé pour la détection du coronavirus du SRAS chez les patients présentant un syndrome clinique suspect constituera une aide essentielle à la détection d’une attaque.
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Références
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