Le Conseil national de l’Ordre des médecins a, dans un communiqué salé, rappelé à l’ordre les auteurs de « protocoles de recherche clinique illégaux » et de « prescriptions hors AMM non justifiées », une allusion mal déguisée en direction du professeur Raoult, visé de plein fouet par une suspension.
Qui veut la peau de Raoult ?
Le Pr Raoult pourrait donc être bientôt suspendu par l’Ordre des Médecins pour « protocole de recherche clinique illégaux ». Le plus grand expert mondial, suspendu. Pourquoi, pour qui, par qui ?
Le Conseil national de l’Ordre reconnaît sans gêne, « l’absence d’une thérapeutique spécifique » : il n’existe pas de traitement. Bien. Nous le savions, tous les laboratoires du monde en cherchent un, frénétiquement.
Mais il ajoute – j’en perds la tête – que par conséquent, et parce qu’il n’existe pas de traitement, « les médecins doivent être un repère encore plus fiable pour les patients ».
Troisièmement, Raoult soigne, mais selon des « prescriptions hors AMM non justifiées ». Quatrième et dernièrement, le Conseil de l’Ordre préfère valoriser ses « repères » – les médecins qui ne soignent pas – que celui qui soigne, mais n’est pas un « repère », car il traite en dehors des normes règlementaires.
Dans son très sévère communiqué, l’Ordre des médecins conclut sur une menace à peine voilée :
« La mise en danger des patients, s’il apparaissait qu’elle puisse être provoquée par des traitements non validés scientifiquement, pourrait justifier la saisine du Directeur général de l’ARS (Agence régionale de santé) pour demander une suspension immédiate de l’activité de ces médecins ».
https://www.conseil-national.medeci...
Suspension d’activité immédiate
Le Conseil de l’Ordre des Médecins menace le Pr Raoult d’une suspension d’activité immédiate, parce que ses essais cliniques « ne respectent pas les procédures officielles », et il risque jusqu’à un an de prison et 15 000 euros d’amende.
Pour rappel, le Pr Raoult a présenté à Emmanuel Macron les résultats de son travail sur 1061 patients.
Près de 92% de malades guéris en dix jours,
Près de 5% de malades guéris « tardivement »
Moins de 5% de « patients avec des complications ».
Soit 31 patients hospitalisés pendant plus de dix jours,
10 transférés en soins intensifs,
et 5 décès. Sur 1061 : faites vos comptes et comparez au reste de la France…
L’abstract et le tableau récapitulatif des données de notre article portant sur le traitement de 1061 patients sont en ligne !
The abstract and the summary table of our paper on the treatment of 1061 patients are online !https://t.co/mTWj6aGpTkhttps://t.co... pic.twitter.com/PLdygNolxG
— Didier Raoult (@raoult_didier) April 10, 2020
La première réaction de l’homme simple que je suis, dans le contexte français délirant que j’observe de loin, est celui-ci : Raoult guérit pendant que la profession patauge. Elle n’a ni réponse, ni traitement, ajoutant l’humiliation des mandarins au ressentiment des galopins. Bref, Raoult doit être suspendu. Ca urge : il risque de soigner encore plus de gens.
© Jean-Patrick Grumberg pour Dreuz.info.
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L’étude “Clinical and microbiological effect of a combination of hydroxychloroquine and azithromycin in 80 COVID-19 patients with at least a six-day follow up : an observational study » publiée le 27 mars 2020 par le Professeur Didier Raoult et son équipe était rétrospective observationnelle et n’entrait pas dans le cadre d’une Recherche Impliquant la Personne Humaine (RIPH) (Article L1121-1 1° du Code de la Santé Publique). En effet, aucune procédure additionnelle aux soins courants n’a été pratiquée sur ces quatre-vingt patients. Les données issues de leurs dossiers cliniques ont été analysées a posteriori. L’hypothèse que l’étude serait une intervention sur la personne non justifiée par sa prise en charge habituelle est fausse car il n’y a eu aucune autre intervention que celles justifiées par les soins courants.
Pour qu’une étude soit soumise aux contraintes déclaratives et à l’obtention d’une autorisation, il faut qu’il s’agisse d’une RIPH relevant d’un des trois cas visés par l’article L1121-1 du Code de la Santé Publique. L’étude publiée le 27 mars 2020 n’entre dans aucun de ces trois cas ; il n’y a pas eu de RIPH.
Le contexte est celui de l’épidémie de Covid-19 causée par un virus émergent, donc mal connu, dont il s’avère qu’une prise en charge dite « standard » par des soins de support se grève d’une morbidité et mortalité importante. Inévitablement, aucune molécule n’a d’autorisation de mise sur le marché (AMM) dans l’indication du traitement du Covid-19. Alors que les connaissances sur le virus et la maladie qu’il cause évoluent au rythme galopant de l’épidémie, les médecins ont administré à leurs patients, en s’appuyant sur les principes énoncés dans le communiqué de presse du 21 mars, ([i]) ce qui leur a paru être le meilleur traitement possible, en fonction des connaissances scientifiques du moment, et de la présentation clinique et du respect des contrindications de chacun. La pratique clinique normale n’est pas décrite dans le contexte d’une maladie émergente et jusqu’ici inconnue, mais elle doit faire appel aux données de la science dans son intégralité, aux essais cliniques antérieurs, à la pratique médicale internationale ayant déjà fait face à la maladie, au bénéfice des patients sur la responsabilité du médecin, y compris la prescription de médicaments hors AMM. Dans ce sens, le Professeur Jérôme Salomon, Directeur Général de la Santé, par mail en date du 28 février 2020, écrivait au Professeur Raoult.
« …s’agissant d’un accès au traitement par hydroxychloroquine en dehors d’un protocole de recherche, je vous rappelle que tout médecin, dans les limites fixées par la loi et compte tenu des données acquises de la science, est libre de ses prescriptions. Cela relève donc de la responsabilité de chaque médecin ».
L’utilisation de l’hydroxychloroquine a été validée par le décret du 25 mars 2020 (i) pris dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, et son association avec l’azithromycine, dans le cas de suspicion de surinfection de pneumopathie, est un traitement usuel qui n’a rien d’expérimental.
C’est bien a posteriori, dans le cadre d’une étude rétrospective, que les données recueillies anonymement à partir des dossiers de ces patients ont été analysées pour décrire les résultats de la prise en charge et des traitements administrés par les médecins. Il est important d’insister sur le fait qu’il ne s’agissait pas d’un essai thérapeutique (qui relèverait d’une RIPH de catégorie I). Les médecins, toujours en s’appuyant sur les principes énoncés dans le communiqué de presse du 21 mars,(i) ont en effet jugé éthiquement inacceptable de mener un essai thérapeutique, car l’état des connaissances au moment de l’étude permettait de réfuter le principe d’équivalence clinique (équipoise) qui justifierait un essai contrôlé du traitement du Covid-19 par la combinaison hydroxychloroquine-azithromycine, soit vs placebo (ou de simples soins de support), soit vs un traitement n’ayant pas montré efficacité et innocuité.
Contrairement à ce qui a été avancé par certains, dans le respect de la Loi, dite « Loi Jardé » et des modalités de classement des protocoles de recherche médicale selon l’interprétation de cette loi,([ii]) il s’agit bien d’une étude rétrospective sur données médicales, pour laquelle ni l’avis d’un CPP, ni celui de l’ANSM est requis. Le fait de réaliser de façon très rapide – rapidité qui est plus que justifiée par la situation d’urgence épidémique et l’importance d’informer rapidement la communauté médicale pour adapter la prise en charge des patients nouvellement atteints de cette maladie aux connaissances les plus récentes – une étude observationnelle sur l’effet des traitements n’est ni une violation des règles légales ni une remise en cause de la nécessité de solliciter l’avis d’un CPP lorsqu’il s’agit d’une étude impliquant la personne humaine. Ceux qui en ont tiré ces conclusions ont interprété à tort qu’il s’agissait d’une RIPH.
([i]) https://www.legifrance.gouv.fr/affi...
([ii]) Validation d’un outil de classement de la recherche à destination des internes de médecine générale d’après la loi « Jardé » Adeline Jouannin, Emilie Andres, Manon de Fallois, Astrid Chevance, Stéphane Donnadieu, Jean-Michel Reymann, Fabienne Pelé, Katharina Appel, Juliette Pinot, Laurent Brutus, Marie-France Mamzer-Bruneel Exercer #155 septembre 2019
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Des virus géants utilisent une défense « immunitaire » proche de CRISPR
Des chercheurs marseillais viennent de découvrir dans des virus géants un mécanisme de défense similaire à celui utilisé par les bactéries contre des intrus, CRISPR, devenu un fabuleux outil de modification du génome.
Mimivirus
ANTIVIRUS. Les virus géants, au diamètre supérieur à 0,5 micromètre (0,5 millième de millimètre), sont aisément visibles avec un simple microscope optique, contrairement aux autres virus. Ils peuvent être infectés par des parasites appelés viriophages. L’un d’entre eux, baptisé Zamilion, a été identifié en 2014 par l’équipe du Pr Didier Raoult de l’université Aix-Marseille (Inserm/CNRS).
Ces virus qui infectent les virus
Cette même équipe rapporte aujourd’hui, dans un article paru dans la revue Nature, qu’une catégorie de virus géants, les mimivirus, utilisent un mécanisme de défense vis-à-vis du viriophage Zamilion qui ressemble beaucoup à celui des bactéries et archées (encore appelées archéobactéries et qui sont des micro-organismes unicellulaires). Celles-ci utilisent en effet le système CRISPR pour se défendre contre des bactériophages (virus infectant des bactéries). Les chercheurs marseillais ont alors découvert, en analysant la séquence génétique de 60 génomes de mimivirus, que les mimivirus possèdent un mécanisme d’immunité similaire vis-à-vis de viriophages (virus infectant des virus).
CRISPR, système de défense bactérien et fabuleux outil d’édition du génome.
Rappelons ce qu’est le système CRISPR, largement médiatisé depuis qu’il a été exploité par tous les grands laboratoires de biologie moléculaire pour “éditer” le génome, autrement dit pour réécrire une séquence ADN, qu’il s’agisse par exemple d’introduire une mutation ou de corriger un défaut génétique.
Le système CRISPR-Cas9 pour (Clustred regularly interspaced short palindromic repeats-Cas9) a été découvert en 2012 par la Française Emmanuelle Charpentier et l’Américaine Jennifer Doudna. Il permet dans des cellules vivantes de couper l’ADN en une position précise. La séquence ciblée peut alors être modifiée avec une simplicité et une efficacité sans précédent.
À l’origine, le système CRISPR-Cas9 a été identifié comme un système de défense de nombreuses bactéries et archées contre des micro-organismes. Lorsqu’un bactériophage infecte la bactérie, il injecte son génome. La bactérie est capable de digérer le génome de l’envahisseur en fragments qui subissent différentes modifications. Celles-ci aboutissent à l’insertion de séquences dans le génome de la bactérie, à un endroit précis, situé entre de nombreux motifs de séquences répétées, appelées CRISPR. Ce système permet à la bactérie de reconnaître et couper l’ADN du micro-organisme étranger lors d’une nouvelle infection. Il s’agit là pour ainsi dire d’un mécanisme de défense “immunitaire” via la dégradation de l’ADN du bactériophage.
Le système de défense du mimivirus vis-à-vis du viriophage a été baptisé Mimivire (pour mimivirus virophage resistance element). Afin de valider leur hypothèse, les chercheurs marseillais ont réduit au silence le système Mimivire. Ce faisant, ils ont rétabli la sensibilité du mimivirus au virophage Zamilon. Preuve que Mimivire est nécessaire pour que ce virus géant puisse se défendre efficacement contre le viriophage.
Rien n’interdit d’imaginer que le système de défense Mimivire puisse, comme son homologue bactérien CRIPSR, rapidement connaître des applications en ingénierie du génome. CRISPR est en effet rapidement sorti des laboratoires de recherche académiques pour être très largement utilisé aujourd’hui par des entreprises de biotechnologies.