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Les habits neufs de l’hypercapitalisme

De Copenhague à Davos via Porto Allegre, économie-carbone et mutation hypercapitalistique

mercredi 3 mars 2010

L’économie occidentale, États-Unis en tête, est en train de muer… Les arthropodes (les crustacés ou les araignées par exemple), pour croître, doivent périodiquement abandonner leur enveloppe devenue trop étroite pour une plus spacieuse. Chez les vertébrés, les serpents pratiquent également la mue, une période de vulnérabilité nécessaire pour endosser des habits neufs plus spacieux. Le « capitalisme » de l’ère manégériale [1] – autrement dit qui n’a plus rien à voir avec l’archéocapitalisme patrimonial dont les paléomarxistes continuent encore de nous rebattre les oreilles – connaît lui aussi ses cycles de mutation ou de transformation systémique.

En 1945 un modèle économique déferle sur ce que l’on nommait à l’époque « le Monde libre ». Un modèle qui scelle l’intégration de l’agriculture dans le secteur industriel annonçant l’unification, aujourd’hui visible, du marché global. L’une des dimensions saillantes de cette mutation concerne donc le secteur primaire (l’exploitation des ressources naturelles et matières premières non transformées) avec la mécanisation agressive et la conquête du marché de la production agricole par les multinationales de l’agrochimie. Bientôt nombre de fermiers naguère indépendants ne seront plus que des sous-traitants, des ouvriers-métayers en quelque sorte, des transnationales de l’agro-industrie.

Ce passage d’une économie, hier encore dominée par la ruralité (en France, 43,8% de la population vit encore directement de la terre en 1906, 31% en 1954) à une économie déjà post industrielle (bien illustrée par le film Playtime de jacques Tati -1967) met un point final à la grande crise de 1929 dont la guerre avait été, entre autres, l’une des conséquences. Il faudra d’ailleurs plusieurs années à l’Amérique pour bénéficier pleinement, notamment à travers les aides liées du plan Marshall, des retombées de sa victoire [2]. Les géants américains des engins agricoles autotractés déferlent sur leVieux Continent par le truchement de l’aide à la reconstruction nord-américaine… Une industrialisation qui sonne la mort des terroirs et la fin du monde rural.

L’Europe de l’Ouest commence alors, à marche forcée, de se mettre aux normes anglo-américaines ; s’ouvre ici une époque que l’on nommera très abusivement les « Trente glorieuses ». L’adoption du « modèle » productiviste induit en effet dès 1945 un exode massif des campagnards qui affluent à la périphérie des villes. Exode qui ne s’achèvera que dans les années soixante-dix à la suite de la politique de remembrement des terres agricoles engagée en 1965. Une migration qui aboutit bientôt à l’hypertrophie carcinogénique des « banlieues » où naissent et croissent les cités dortoirs, dépotoirs humains où viendront s’entasser en 1962 les rapatriés d’Algérie avant d’accueillir le flux montant de l’immigration.

On voit aujourd’hui quels sont les bienfaits véritables de cette première grande mutation de la fin de l’ère industrielle : des paysages arasés par les restructurations territoriales et le recours à des machines de plus en plus monstrueuses, une nappe phréatique extensivement contaminée par un usage délirant des intrants chimiques, engrais et pesticides qui polluent également sous forme d’aérosols l’air que nous respirons jusqu’au cœur même de nos métropoles… L’exode rural qui s’est étalé quarante années durant en Europe occidentale, s’accomplit aujourd’hui sous nos yeux dans l’Europe orientale soumise aux contraintes normalisatrices liées à la « construction » européenne. Cela sans pour autant que les leçons d’un passé encore récent aient été, en quoi que ce soit, tirées.

2008 aura, semble-t-il, été marqué d’une rupture analogue - au moins d’un point de vue civilisationnel - que celle qui accompagna la victoire alliée sur le Reich allemand. Après la destruction accélérée des sociétés traditionnelles d’Europe de l’Ouest qui ont été littéralement « déracinées » pour se trouver projetées dans la modernité consumériste (nous passons au cours de cette période d’une économie basée sur l’épargne à une autre fondée sur le crédit puis sur la dette chronique - une forme inédite de servage - nous assistons maintenant à un nouveau changement de paradigme écosociétal.

En 2010, après les douleurs de l’accouchement, c’est un autre modèle qui tente de se mettre en place qui réduira vraisemblablement l’industrie occidentale à la portion congrue au profit des activités de services et de très hautes valeurs ajoutées (électronique, génie génétique, nanotechnique, bionique, et cœtera).

Mais au demeurant, quoiqu’on en dise, si la Chine monte en puissance en s’affirmant comme l’atelier du monde, les sources du pouvoir économique planétaire dans sa dimension financière se trouvent toujours sur les berges de la Tamise, du fleuve Hudson (et accessoirement de l’Amstel), ainsi que sur la rive gauche du Potomac où siègent les grandes institutions financières : Banque mondiale, Fonds monétaire international et surtout Réserve fédérale à la tête de laquelle M. Bernanke vient d’être réélu faute d’alternative, pilote des pilotes de l’économie mondiale tant que le « DD », le dieu dollar, n’aura pas vu son règne s’achever.

Un règne certes contesté [3] mais qui n’est pas encore au bout de ses capacités de rebond. On l’a vu lors de sa réappréciation de février 2010 face à l’Euro en proie à des attaques inamicales. Des événements trop récents pour être parfaitement éclaircis mais qui se déroulent comme souvent selon un scénario convenu : des établissements financiers de Manhattan tels Goldman Sachs auraient d’un coté aidé l’état grec à négocier sa dette sur les marchés, de l’autre ils manipuleraient certains « fonds spéculatifs » (hedge funds) pour lancer des attaques contre l’Euro, en clair contre l’Union européenne à travers la Grèce… Ce qui en dit long sur l’audace de ces traiders et sur les capacités offensives du système, l’art et la science de la manipulation de la dette à des fins de mise sous tutelle (ou de rappel à l’ordre) des États. Le FMI, organe subsidiaire de l’informelle gouvernance mondiale, ne s’est-il pas proposé à l’occasion de la crise hellénique de venir se mêler d’aider l’Europe sous-développée désormais incapable de gérer seule sa dette ?

Les sanctuaires du dieu dollar évoqués perdureront donc autant que s’y trouvera pérennisée la source créatrice de la nouvelle économie mondiale financiariste considérée tout à la fois comme art, science et technique…autrement dit tant que ces places fortes de l’ultracapitalisme où s’élaborent toutes les gammes des nouveaux produits virtuels et les outils afférents, constitueront le cœur du réacteur de l’économie mondiale… C’est à ce titre que, quand le 15 septembre 2008, ce cœur s’est un instant arrêté de battre, c’est la planète entière qui s’est tétanisée.

Suivant en cela l’exemple américain, l’Europe passe donc à présent progressivement (mais avec des décrochages impressionnants : vague de restructurations et de délocalisation des années quatre-vingt-dix, contraction brutale de 2009…) d’une économie de production à une “économie de services” en grande partie dominée par le tourisme (l’Europe-musée, un mixte de Disneyland et de Versailles, celui-ci revu et corrigé par les homards bleus suspendus dans la salle des Victoires par l’ex ministre de la sous-culture Albanel).

Le géant de l’automobile General Motors ayant été détrôné (successivement par Toyota puis Fiat, un fait non contradictoire avec la suite de notre propos), l’inventive Amérique est déjà « ailleurs ». Si les industries en général ne sont évidemment pas à mettre au rang de reliques économiques, il n’en reste pas moins que, pour sa part, la prospérité des États-Unis n’en dépend plus directement qu’en proportion moindre…

Notons au passage que certaines activités créent des dépendances quasi absolues pour les économies périphériques vis-à-vis du « centre » émetteur. Prenons l’exemple du semencier américain Monsanto qui, grâce à des espèces végétales génétiquement modifiées (OGM) lesquelles sont obligatoirement associées à tout un arsenal phytosanitaire violemment agressif, entre autres des pesticides mutagènes aux effets dévastateurs sur l’environnement tel l’herbicide Roundup, étend son emprise sur une partie croissante de la planète en créant d’étroits liens clientélistes - notamment en raison du brevetage des semences - chez les producteurs ; des liens de sujétion dont ils auront beaucoup de peine à s’affranchir… et une cause de ruine pour les productions locales.

Il ressort clairement de notre propos que l’activité « motrice » de l’économie nord-américaine tend à présent à devoir être l’ingénierie financière avec son cortège de produits dérivés déclinés dans des gammes toujours plus étendues, originales et innovantes.

Le secteur industriel se trouvant par conséquent « rétrogradé », il devra trouver son exact locus au sein de la nouvelle épistémè hypercapitalistique en cours d’installation, autrement dit occuper une nouvelle place fonctionnelle au sein d’un système global dont la source, avons-nous dit, n’est autre, à portée de vue et pour un temps indéfini, que l’Amérique-monde.

La souplesse adaptative des salariés américains – il est coutume de parler maintenant, sur le mode anglo-saxon, de flexibilité – habitués qu’ils sont à une « économie nomade » (nul n’hésite en Amérique à se déplacer du nord au sud et d’est en ouest du continent pour un emploi ; un état d’esprit hérité des migrants de l’ancien monde, du Pioneering Spirit ou tout bêtement d’une nécessité s’étant imposée avec la Grande Crise des années trente) qui n’est pas dans les traditions de la veille Europe… en dépit du fait que celle-ci ait connu d’importantes vagues d’émigration principalement vers les États-Unis : Italiens, Grecs, Suédois et un quart des Irlandais après la grande famine de 1845-1849.

C’est à tort que les Européens suivent donc l’exemple de la désindustrialisation américaine et que nous fonçons tête baissée dans les leurres de l’économie dématérialisée et de son dernier avatar l’économie-carbone.

Fragilisée par la mondialisation et la concurrence des pays producteurs à moindre coût social et environnemental, l’industrie européenne est à l’heure actuelle sous perfusion, ce pourquoi il faut dénoncer sans relâche le piège tendu par la classe politicienne européiste, de « droite » comme de « gauche », qui voudrait plomber plus encore la production industrielle sous ces taxes-carbone qui seraient autant de pénalités supplémentaires dans un secteur déjà mis au pillage par les produits manufacturés ultra-concurrentiels des économies dites émergentes.

Nous ne parlons pas ici des groupes transnationaux qui eux échappent largement à l’impôt (taux moyen d’imposition à 30% contre 45% en France pour les entreprises ordinaires) en ayant recours aux places financières off shore (autrement dit les paradis fiscaux insulaires). Une situation parfaitement injuste mais cependant rendue nécessaire par les conditions mêmes de la concurrence mondiale… Quant à M.Rocard, ancien Premier ministre socialiste, ci-devant président de la Conférence d’experts sur la création d’une taxe carbone ou Contribution climat énergie (CCE) [4], il s’est fait le bon apôtre de taux prohibitifs pour la taxation carbone à l’instar des « Verts » qui paradoxalement sont parvenus à convaincre l’opinion de leur engagement philanthropique au service de l’humanité exploitée [5].

Le lecteur commence certainement à saisir notre propos… Londres et Amsterdam étant la base-arrière-avancée de Manhattan dont l’emprise s’étend à l’UE par le truchement du « NYSE Euronext, Inc » né en 2007 de la fusion entre le New York Stock Exchange et le groupe Euronext, lui-même issu de la fusion en 2006 du London International Financial Futures and options Exchange avec les Bourses de Paris, Amsterdam, Bruxelles, Lisbonne et Porto, l’Europe se voit incitée à se fondre de plus en plus dans la nouvelle économie du « néant ».

Par néant il faut entendre de l’actif artificiel, de la valeur matériellement inexistante, des jeux d’écritures (dont les quotas d’émission carbone - voir supra) appuyées sur une monnaie de singe, le Dollar papier et sa version obligataire sous forme de TBonds… Gardons en mémoire qu’en 2009 l’État fédéral américain faisait imprimer les billets – dont la valeur réelle se rapportait à leur seul coût d’impression - avec lesquels il se rachetait de la main gauche les bons du Trésor émis de la main droite. Étonnant bonneteau !

Jeux d’écritures, tours de passe-passe et économie virtuelle sont tout un. L’économie-carbone, les nouvelles filières vertes [6] créées de toute pièce à partir de calculs et de conclusions se parant des prestiges de la science pour mieux la trahir, n’a évidemment pas pour finalité une réorientation substantielle de l’économie au profit d’une gestion rationnelle des ressources ménagères de l’avenir, mais principalement la relance de la croissance et la consolidation du Marché.

De ce point de vue, la distorsion du réel et le détournement d’une légitime inquiétude des opinions relatives à la destruction accélérée du milieu naturel à des fins mercantiles, se révèlent à l’usage extrêmement juteuses… et si « le mort saisi le vif », le système failli dont les turpitudes ont été mises à nu (mais sans conséquence immédiate pour lui), se refait une virginité en transférant, sans autre forme de procès, la totalité de son patrimoine génétique et de ses capacités de nuisance au secours prétendu de la planète agonisante.

Pour l’heure, contrairement à ce que beaucoup pensent, l’arrivée sur la scène internationale de nouvelles grandes puissances - Chine, Inde, Brésil -ne changent rien sur le fond à la configuration dynamique du Nouvel Ordre mondial, au contraire dès lors que tous sont solidairement interactifs au sein d’un système unique dont les centre nerveux se trouvent au nord-est des États-Unis et au Royaume-Uni.

Nous n’assistons donc (voir supra 1re partie) qu’à une recomposition de la division internationale du travail avec pour corollaire une mondialisation (un marché unifié) dont l’intégration progresse à vue d’œil… Sommairement, la Chine est ainsi devenue le premier État-atelier de l’économie-monde, l’Inde en est le sidérurgiste et le prestataire de services informatiques, le Brésil produit les oléoprotéagineux nécessaires à notre surconsommation de produits carnés et des agrocarburants destinés à alléger certaines dépendances aux produits pétroliers importés…

Certes des règles communes sous l’égide de l’Organisation mondiale du Commerce et une interdépendance modératrice des ardeurs concurrentielles induisent certaines formes de solidarité entre les acteurs au sein du système universel, ceci contribuant à créer réciproquement de la richesse.

Cependant ce serait une lourde erreur que de prendre les inévitables, voire inexpiables, rivalités entre grandes puissances pour le contrôle et la mainmise sur les ressources naturelles, pour une contestation ou une remise en question du système par les uns ou par les autres… De féroces concurrents qui s’affrontent dans des guerres intraspécifiques, des guerres indirectes, guerres masquées comme celle par exemple opposant les É-U et la Chine sur le continent africain, au Darfour en particulier.

Les antagonismes sont en effet d’abord géostratégiques dans le cadre de cette « impitoyable guerre économique qui ne dit pas son nom » (François Mitterrand)… Mais, contrairement aux désirs des adversaires du mondialisme, nul parmi les « Grands » ne propose une quelconque révolution conceptuelle… À savoir une sortie du modèle ultralibéral et la construction d’une vision holistique des rapports de l’homme avec son environnement biologique et physique, et de la place qu’il doit occuper dans la Nature et singulièrement dans le fleuve du vivant [7].

Jusqu’à preuve du contraire la Fédération de Russie, opposante de longue date au bloc atlantiste, ne propose aucune alternative au système actuel et surtout, n’évoque pas même la nécessité d’en chercher une. Ennemie du bloc capitaliste depuis 1945 et jusqu’à la fin du régime soviétique, les deux superpuissances n’en continuent pas moins à fonder leur légitimité morale sur un certain nombre de mythes (ceux-là mêmes aujourd’hui remis en cause par les pays Baltes) fondateurs du Nouvel Ordre International né, peu ou prou, en 1945 à Yalta. Quant à la Chine populaire et néo-impériale, elle est l’exemple même d’une intégration réussie au sein du système global ultralibéral.

Cependant, quelle que soit la force des interdépendances qui lient actuellement les partenaires et rivaux (la moitié des réserves d’actifs chinois sont libellées en Bons du Trésor américains, soit quelque 1400 milliards de $), cela ne signifie pas que n’éclateront des guerres locales ou régionales… Les zones de tensions ou de frictions sont nombreuses et chacun s’entendra à défendre becs et ongles ses territoires de chasse, à savoir ses marchés, sa clientèle, ses sources d’approvisionnement, ses zones d’influence.

Les différents Chine/É-U sur le Tibet et Taïwan sont illustratifs de ce point de vue et c’est à tort que l’on croirait, avec plus ou moins d’autosuggestion, que l’actuel système d’interdépendances économiques et financières fortes garantisse la stabilité et la paix. Insistons sur le fait que les rivalités et les antagonismes géopolitiques et géoéconomiques ne constituent en aucun cas une remise en question de la logique systémique aujourd’hui à l’œuvre pour le plus grand dommage des hommes, des peuples, de la civilisation et du vivant en général.

Dans le même ordre d’idée, c’est à partir de ce constat qu’il faut apprécier la portée et la signification exacte de la contestation qui s’est exprimée à Copenhague en novembre 2009 ou au forum social de Porto Alegre fin janvier 2010.

La position des Verts a été analysée plus haut comme participant d’une surenchère libéraliste-libertaire visant à toujours plus de liberté pour le marché et à un encadrement fiscal et réglementaire toujours plus étroit pour les industries nationales moyennes ou petites (indépendamment de leur présence sur les marchés extérieurs) à l’exception des groupes transnationaux qui eux y échappent en grande partie, avec l’active complicité des gouvernements grâce à leurs domiciliations excentrées (Macao, Chypre, Îles anglo-normandes, Bahamas, des enclaves juridiques comme l’état du Delaware etc.)…

Mais le « système » ne l’impose-t-il pas ? Il faut à ce propos éviter de tomber dans un moralisme à la petite semaine : la guerre économique, bien réelle mais peu visible pour l’opinion, relève essentiellement de la real politik et non de la morale ordinaire. Il est facile d’ailleurs pour les décideurs politiques d’agiter des chiffons rouges sous les yeux de l’opinion et de lui livrer en pâture les paradis fiscaux – qui n’ont joué aucun rôle dans la crise - ou les sur-rémunérations des traders, lesquels ne sont que des agents du système et en aucun cas des donneurs d’ordre ou des décisionnaires de premier plan.

Autant de leurres destinés à polariser l’indignation et à divertir ainsi l’attention des foules sur des points marginaux en faisant coup double par l’élimination de « paradis fiscaux » concurrents, la Suisse, le Luxembourg, le Lichtenstein par exemple. « Paradis » qui, à bien y regarder, constituaient autant d’isolats culturels et de bastions de résistance au laminage mondialiste et à la « moralisation » sur mesure qui le précède : une exigence de moralisation des acteurs au seul profit des places fortes anglo-américaines, au final destinée à assurer un quasi monopole aux paradis domestiques, Londres et Manhattan en tête…

L’ultralibéralisme ennemi des libertés [8] en général - sauf en ce qui regarde celles des marchés, la libre circulation des marchandises, des signes monétaires et des oligarchies qui en sont détentrices - se révèle être en réalité une forme de despotisme exacerbé à l’égard des producteurs indépendants et de la propriété patrimoniale.

À l’expérience, force est de constater que la « dérégulation » du marché - ce qui constitue sa raison d’être : une absolue liberté transactionnelle condition d’une supposée richesse des nations - s’accompagne nécessairement d’une destruction corrélative des structures sociales… Car fluidifier le marché revient à dissoudre l’organisation sociétale existante pour la « recomposer » ici, et parfois « ailleurs » lorsqu’on délocalise et que l’on débauche massivement… C’est également encourager la fragmentation sociale en segmentant le marché à l’infini, c’est-à-dire en créant de nouveaux besoins pour de nouvelles clientèles développées plus ou moins artificiellement à coup d’incitations consuméristes, égotistes et libertaires (l’individu s’affirmant par opposition à la norme sociale)… ados, enfants de plus en plus en plus jeunes, minorités sexuelles, ethniques, dysfonctionnelles deviennent autant de segments d’un marché communautarisé comme facteur de délitement du corps social.

Quant au tissu industriel européen, il est démantelé et transféré dans les pays à économie émergente laissant sur le carreau les hommes et leur savoir-faire (ne parlons pas des brevets rachetés ou transférés avec les entreprises dépaysées !)… Or les choses ne se faisant pas sans casse, un contrôle social de plus en plus serré et des normes sécuritaires de plus en plus lourdes s’imposent. Le paradoxe n’est donc qu’apparent entre libéralisation du marché et restrictions des libertés, l’une ne pouvant aller sans l’autre…

Certes les Altermondialistes réunis à Porto Alegre demandaient à cor et à cris « plus de régulation », mais sans pour autant remettre en question la logique intrinsèque du système, sauf pour quelques-uns uns à retomber dans l’imposture idéologique de l’anti-capitalisme [9]. Le communisme n’abolit pas les hiérarchies sociales, au contraire, il les exacerbe !

Si l’on donne du « capitalisme » cette définition nouvelle, à savoir qu’il serait « l’organisation de la production de biens et de services sur la base d’une hiérarchie de commandement – qui peut être de divers ordres : héréditaire (capitalisme patrimonial), d’initiative (entrepreneurial), de compétences réelles ou postulées (managérial), de contrôle financier (actionnarial), et cœtera », on voit bien que le « capitalisme » est proprement inhérent à la nature humaine et que vouloir l’abolir est un prodigieux non-sens. Cela ne veut pas évidemment pas dire qu’il ne faille pas combattre l’injustice sociale, le mésusage la propriété privée des moyens de production, l’exploitation de l’homme par l’homme (et des femmes par certains hommes)… mais non de se faire négateur de la réalité ce qui est un vrai danger et contre lequel nous devons continuer de nous armer intellectuellement. Le XXe siècle nous a trop montré la faillite (sanglante) des idéologies prétendument anti-capitalistes pour que nous n’en tenions pas compte : des idéologies qui ont finalement accouché d’une perversion plus monstrueuse encore, l’hypercapitalisme sans foi ni loi.]], version actualisée du communisme, ce dernier n’ayant sans doute pas encore engendré suffisamment d’hécatombes pour en dégoûter ou en décourager à jamais les adeptes.

En effet, pas plus que les « Verts », les Alter-mondialistes en général ne sont des contestataires conséquents de l’ordre établi et du paradigme hypercapitalistique (système de l’économie-monde ultralibérale) qui n’est au fond qu’un prolongement moderniste d’une économie de pure prédation dont on aurait retranché la sagesse des peuples primitifs qui savaient, eux ménager leurs ressources en les épuisant point tout à fait... l’exploitation démentielle des mers et des ressources halieutiques illustre bien cette assertion.

Qu’est-ce qu’en effet qu’un système basé sur la destruction sans limites (la consommation) et sans ménagement du futur ? Il s’agit donc maintenant d’arrêter de « dévorer » la planète, autrement dit, cesser de pratiquer l’autophagie : celle du monde qui nous porte, notre enveloppe matricielle.

Il aura suffi d’observer avec amusement les aller et retour Davos-Porto Alegre du Président brésilien Lula da Sylva où il a été accueilli en alter héraut, pour se convaincre que les deux sommets ne sont que deux scènes et deux manifestations d’une seule et même représentation.

Qui est d’ailleurs Luiz Ignacio da Silva dit « Lula » ? Au risque de contrevenir aux clichés établis, l’alter héraut de la mouvance alter-mondialiste (laquelle comme son nom l’indique n’est pas opposée au mondialisme, mais veut l’orienter différemment) est un populiste néo-conservateur à la mode sud-américaine. Il en a d’ailleurs le « profilé » : ancien syndicaliste trotskyste [10], son parcours idéologique est somme toute analogue à bien des égards à celui de nombre de ces hommes d’influence que l’on retrouve propulsés sur le devant des scènes politiques de l’aire euratlantiste… ou que l’on croise - en réserve d’un destin fédéral au sein de l’Union - dans les diverses « Fondations » qui pullulent à Washington.

Lula da Silva de la même façon, aura eu un parcours exemplaire : de la lutte subversive à la méga agro-industrie (carburants « verts » et protéines végétales) qui s’étend à l’infini sur les cendres de la forêt amazonienne et sur le corps vivant de ce prodigieux joyau naturel qu’est le Pantanal. Ironie du sort son nom, da Silva, renvoie à la selve primordiale, celle-là même que cet alter héraut d’un mondialisme paré aux couleurs de l’humanisme tiers-mondiste, cet ami des puissants, fait détruire à un rythme effréné [11].

L’hypercapitalisme est-il une fatalité tout comme son hybridation préemptive (son mariage morganatique) avec le marxisme-léninisme ?

À Davos, l’homologue français du président brésilien, M. Sarkozy croit avoir trouvé la panacée à la crise civilisationnelle qui nous éprouve et aux catastrophes qui nous guettent dans une « moralisation » du système… Tous les espoirs sont donc permis !

Une position qui mérite que l’on s’y arrête un instant… S’il s’agit en effet de moraliser le système encore faudrait-il qu’il soit susceptible de l’être. En effet est-il envisageable de « moraliser » des comportements qui ne soient déjà moraux au préalable ? Autrement dit adossés à une claire distinction entre « bien » et « mal » à partir d’une échelle fixe de valeurs… Mais comment effectuer le « réglage » d’un système par définition sans règle, libre parce que « dérégulé », et dont le sport favori est de contourner ou de ridiculiser toutes les règles ? Goldman Sachs & comparses, ne prête-t-il pas à la Grèce au taux de 6% de l’argent dont les contribuables américains l’ont approvisionné à 1% ? Le Krach de septembre 2008 tout comme l’effondrement de la Grèce ont révélé que tous les acteurs du jeu financier participaient d’une tricherie générale : des stratèges de la prédation aux agences de cotation…

Ajoutons que le monde financier n’est au final que l’expression ou le reflet d’une dérégulation universelle de la pensée qui s’est mise à « flotter » en même temps que les taux de change : le pragmatisme absolu inhérent à un jeu sans règle caractérisé par une perpétuelle adaptation aux changements du terrain fait mauvais ménage avec une morale forcément restrictive (limitative). La morale, règle des règles a donc été – une fois pour toutes – jetée par-dessus bord afin de débrider le moteur et de donner toute sa puissance au réacteur financier.

De nos jours, les points de vue moraux se sont d’ailleurs multipliés à l’infini pour créer autant de « morales » sur mesure selon les besoins ! La morale bien distincte du droit et qui lui est même souvent opposée (le légitime ne se confondant plus avec le licite), ressemble à s’y méprendre à l’appréciation subjective et personnelle en matière esthétique… tout un chacun revendique haut et fort le droit fondamental de ne voir midi qu’à sa porte et de décider en totale souveraineté personnelle du « beau » et du « laid » (à la fin la distinction finit par s’estomper voire s’abolir), l’unique critère (objectif) reconnu pour décider du beau et du bon étant en dernier ressort la valeur commerciale attachée à l’objet, comme d’ailleurs au « sujet », l’individu dont la « valeur » intrinsèque se réduit désormais à sa seule surface financière.

Ainsi est-il dorénavant accoutumé de dire qu’il y a eu « déplacement » et surtout, « perte des repères » moraux ou simplement comportementaux. Une politique d’encadrement renforcé des marchés semble donc dans un tel contexte général doublement irréaliste : primo parce que l’idée même de « marché libre » est en soi incompatible avec une quelconque tutelle ou encadrement autre que cosmétique ou de façade (une intention par excellence antinomique du libre-échange) ; deusio parce que l’encadrement supposé aura toujours un temps de retard par rapport à l’inventivité et à l’ingéniosité ou à l’extrême volatilité morale (théorisée pour partie par l’école libertarienne) des grands manieurs d’actifs virtuels et autres joueurs de kriegspiel financiers… toutes dispositions intellectuelles et morales qui nantissent ces nouveaux Icares de merveilleuses sandales aux semelles de vent leur permettant de sillonner la stratosphère dans leurs jets loin des contingences et des misères terrestres.

De ce point de vue, on ne saurait envisager de moraliser la vie financière qu’en re-fabriquant des hommes obéissant eux-mêmes à une morale supérieure. Ce n’est pas l’air du temps. On ne s’enrichit plus aujourd’hui à la façon dont Guizot [12] le souhaitait, c’est-à-dire pour créer de la richesse collective… l’on vit et l’on n’agit plus que pour soi. Moraliser le vortex de la finance internationale est donc au mieux un vœu pieux mais plus sûrement un creux verbiage.

Il fut un temps où le « capitalisme » respectait certaines limites (au moins certains capitalistes sous l’influence d’un protestantisme bien compris dans le monde anglo-saxon, en France et en Allemagne, notamment à la fin du XIXe siècle et au début du XXe, sous l’influence de la doctrine sociale de l’Église) tant qu’il fut imprégné de valeurs chrétiennes lui servant de « limites » ou de garde-fou, c’est-à-dire établissant de façon claire le champ du « bien » et du « mal », du légitime et de l’illégitime.

Le capitalisme industriel (dans les cas où il se trouvait déjà sous-tendu par une exigence éthique), sut également trouver dans l’utilitarisme philosophique une morale rationnelle rendant licite l’enrichissement personnel – et même l’encourageant – comme moyen de contribuer à la prospérité collective. Bref, l’utilitarisme avec beaucoup de bon sens considère que l’honnêteté et l’altruisme sont à la fois d’un bon rendement social et un moyen assuré de réussir en affaires. La maxime « honesty is the best policy » traduit ici assez bien cet état d’esprit.

On se reportera à ce sujet avec profit aux biographies des grands entrepreneurs [13] dits « paternalistes » (expression utilisée avec toute la condescendance voir le mépris d’usage) qui, tant en Europe occidentale qu’aux États-Unis, ont assuré le travail, le logement, les services sanitaires, des loisirs et souvent l’éducation à des familles ouvrières sur plusieurs générations… Le socialisme pour sa part – c’est un fait - n’est jamais parvenu à mieux faire sur la durée !

La loi, en ce qui la regarde, ne définissant que le licite et l’illicite indépendamment d’une éthique intangible, et en s’appliquant à suivre l’évolution des mœurs à savoir une supposée demande sociale n’a fait que repousser constamment la ligne de démarcation établie de longue date par la morale naturelle. Car sur la base de quelle consultation démocratiquement populaire dépénalise-t-on tel ou tel acte naguère « délinquant » ou tel secteur d’activité jadis « criminel », la drogue en étant un exemple parmi mille autres ? Est-il par conséquent loisible de parler de « moralisation » du grand banditisme financier international si la société se veut chaque jour davantage permissive et de moins en moins répressive à bon escient ?

Pour qui regarde les choses avec un peu d’attention il apparaît bien que la dérégulation économique ne fait que répondre ou accompagner la libération, ou le cas échéant le « dérèglement » des mœurs et l’effritement du socle éthique sur lequel s’est édifié, et repose encore, la « civilisation », prise au sens large. À ce titre, il apparaît que les causes premières des crises qui nous affectent – crise financière, économique, sociale, alimentaire, environnementale, etc – se situent dans une crise de civilisation, elle-même crise de nature « morale ».

De la même façon que certaines mouches parasites pondent un œuf sur certaines fourmis, lequel œuf devenu larve dévore son hôte de l’intérieur, la révolution conservatrice néolibérale (qui tire une forte part de son inspiration du courant révolutionnaire trotskyste), après s’être débarrassée de toute servitude éthique, s’est maintenant installée sans bruit dans la peau de l’écologie pour la phagocyter sans tapage.

De sorte que la « contestation » environnementaliste récupérée se retrouve placée au centre du système avec un statut d’outil privilégié de relance et accessoirement comme moyen de légitimation de l’ordre « intérieur », de la contention des peuples nécessaire au nom de l’urgence éco-climatique, cette dernière justifiant a posteriori le libre exercice des forces du marché. Le « développement durable » redore ainsi le blason terni de l’hypercapitalisme, fait passer au second plan sa contestation et rend acceptable (déculpabilise) tous les excès d’une consommation compulsive.

Consommation qui ne vise pas à satisfaire des besoins mais assure le recyclage permanent de productions à courte durée de vie. Servant par la même occasion à compenser toutes les frustrations engendrées par des modes de vies artificialisés… À estomper du même coup l’anxiété diffuse liée à une instabilité sociétale croissante et accompagnant l’accélération continuelle de la circulation des biens et des signes monétaires.

Une accélération des cycles production/destruction qui déstabilise en profondeur les sociétés post-industrielles puisque la quête de gains rend nomades les approvisionnements en matières premières et la production, les fonds d’investissements étant en perpétuelle migration opportuniste selon la logique des essaims de criquets pèlerins. Une surconsommation qui libère également d’une culpabilité rampante installée depuis peu dans les consciences (et pas seulement celles des occidentaux) qui ne peuvent plus davantage ignorer les ravages d’un système prédateur sans foi ni loi…

Or, de même que l’art moderne n’existe en grande partie qu’à partir et en raison du verbiage qui le nimbe (un « art » antidémocratique par excellence puisqu’on n’y accède que par le truchement du langage, à savoir d’un décryptage « savant » que seuls savent manier les galliéristes et les « critiques d’art » à leur solde). Ainsi la « période verte » de l’ultralibéralisme s’entoure-t-elle d’un abondant et savant brouillard rhétorique relatif à une « croissance respectueuse de la nature », cela grâce aux énergies renouvelables, aux industries de dépollution, au génie génétique, à la recherche, etc, etc...

Le Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat (Giec) [14], organe technique de la gouvernance mondiale, a réalisé un montage qui a fait illusion le temps suffisant à créer un nouvel élément mythique pour l’édifice idéologique justifiant la construction et l’instauration d’un pouvoir supranational à l’échelon planétaire, autrement dit l’instauration d’une « gouvernance » mondiale. Gouvernance qui échoira nécessairement aux mains d’oligarchies financières, celles-là même qui nommeront, ou éjecteront, les hommes et les gouvernements chargés de relayer leurs politiques à travers le monde.

Le catastrophisme écologique comme interprétations de fluctuations et des phénomènes climatiques qui échappent encore à une pleine compréhension scientifique, est ainsi maintenant exploité à fond pour orienter l’opinion publique afin que celle-ci s’engouffre dans des voies toutes tracées et soigneusement balisées par un « système » se présentant finalement en sauveur de l’humanité.

Une démarche qui, en s’appuyant sur la peur d’un réchauffement climatique cataclysmique, mais avec l’autorité de la communauté scientifique, exclue d’emblée toute réflexion sur le fond et manie la peur… Une crainte qui se combine à une culture de la « Solidarité » à l’égard des plus démunis dont les manifestations les plus spectaculaires ont eu lieu à l’occasion du Tsunami (26 décembre 2004) et du séisme de Port-au-Prince (13 janvier 2010). Des solidarités de masse méthodiquement et médiatiquement entretenues afin d’alimenter en abondance le « secteur » en pleine expansion de l’aide humanitaire.

Peur universelle et solidarité active destinées in fine à bannir toute raison raisonnablement critique à l’égard d’un système qui exploite simultanément d’un côté la peur et de l’autre la compassion sur fond d’optimisme irrationnel suivant lequel « l’Humanité menacée dans sa survie trouvera toujours une solution aux défis qu’elle est appelée à relever ». Or rien n’est moins sûr !

Il n’en demeure pas moins que dans la situation présente la solution avancée, l’hypercapitalisme repeint aux couleurs de l’Arc-en-ciel, n’est pas la solution, mais la perpétuation du mal lui-même… Quelques symptômes – les plus criants – seront effacés du paysage, mais le mal continuera à ronger les sociétés et à dévorer la nature condamnée à dépérir jusqu’à ce que désert s’ensuive.

A contrario le marché rebaptisé « durable » [15] continuera à déployer son inexorable logique de croissance exponentielle et d’exploitation à mort des « ressources » naturelles et humaines. Quant aux échanges se voulant « équitables », il est en toute logique destiné à rester relativement marginal puisque hors circuits des mégastructures commerciales génératrices de plus-value at large. Une industrie de la rente jamais à court de paradoxes ni d’inventivité qui fera prospérer par exemple, le commerce des permis de polluer [16] tout en faisant admettre génialement (et sans rouspétance) l’amère pilule des innombrables éco-taxes présentes et à venir. Ainsi la société éco-totalitaire est-elle, quoiqu’on en veuille, en marche sur une route densément pavée de bons sentiments.

Nous n’entrerons pas dans le débat scientifique relatif à l’ampleur ou aux causes déterminantes d’un réchauffement climatique réel ou supposé, telle n’est pas la question [17]. Cependant, il est indéniable que la planète est actuellement le théâtre de désordres climatiques dont les origines combinées sont à coup sûr multiples, qu’ils soient dus à l’activité solaire, tellurique ou aux ravages de l’activité humaine, tout cela ne change rien à l’affaire. Cependant, les hommes et leurs gouvernements, égarés par une culture d’irresponsabilité et d’une inconséquence égocentrée – après nous, le déluge ! - doivent évidemment veiller à ne pas en rajouter, autrement dit à ne pas contribuer à accentuer des tendances déjà singulièrement négatives dans le contexte actuel ; or nous ne parlons pas ici du climat mais de la déforestation massive de la planète, de la destruction (peut-être irréversible) de nombreux écosystèmes terrestres et marins, de la menace d’extinction massive d’espèces animales…

L’incidence des déforestations à grande échelle sur les climats régionaux n’est par ailleurs plus à démontrer, en matière de sécheresse notamment. De ce point de vue, s’il est question de dénoncer le stratagème d’une instrumentation du changement climatique à des fins géoéconomiques, voire géostratégiques (l’instauration d’une gouvernance régulatrice des émissions de carbone crée de fait des instruments de contrôle sur les économies nationales ; or qui décide des règles, décide du jeu), il est tout aussi nécessaire de dénoncer (avec vigueur) le détournement de la science à des fins idéologiques, autrement dit à des fins de pouvoir [18].

Nous voulons parler de la collusion d’une fraction de la communauté scientifique avec de touts-puissants intérêts financiers et géopolitiques qui sous-tendent l’agitation et le battage faits autour du changement climatique. Notons à ce propos que la tyrannie consensuelle - une fois que la logique systémique du catastrophisme climatique s’est trouvée enclenchée – joue à plein et que rares sont les chefs d’États ou de gouvernement qui osent aller à contre-courant.

Le bolivarien Chavez lui-même, le croquemitaine de l’Amérique latine, ne peut échapper complètement à la religion dominante, laquelle, nous l’avons vu, n’est que le masque idéologique d’une gouvernance mondiale en marche sous des oripeaux scientistes… une attitude emblématique de la domination idéologique qu’est parvenue à imposer l’autorité de la science détournée à des fins de prépotence ! [19].

Replacé dans le contexte des grandes peurs tétanisantes qui ont été instrumentées depuis le début du millénaire (le Terrorisme infiniment moins dangereux et meurtrier que le trafic de drogue, et, à ce titre, revêtu d’un inquiétant caractère d’irrationalité ; la pandémie fantôme de grippe porcine ; la crise financière qui aura permis un enrichissement spectaculaire, après refinancements publics, d’établissements financiers dont les dérives coupables auront été la cause d’un krach boursier de magnitude élevée…), la suspicion légitime qui se manifeste et qui croît à l’égard du discours dominant montre un divorce grandissant entre l’opinion publique – au sens large – et des gouvernements qui ne tiennent aucun compte de ce désaccord, voire de ce désaveu.

À ce sujet le rôle déplorable joué par la grande presse est proprement détestable [20]. Il aura fallu qu’une partie de la communauté scientifique s’insurge du trucage à grande échelle des chiffres et des résultats du Giec pour que l’on commence, sous la pression de révélations difficiles à nier, à faire quelques concessions en vu d’apaiser une certaine « colère » montante. Sur le fond pourtant rien n’a changé : la finance verte est opérationnelle, la « machine » globalisante est lancée et nul n’annonce un quelconque retour quant aux taxations carbone…

Au final, pour nous résumer, que constatons-nous ? Qu’ayant déclenché et orchestré la grande peur du réchauffement climatique, le Club des puissants vient d’inventer une nouvelle forme d’économie dématérialisée, le commerce du « carbone », un concept décliné sous d’innombrables formes et qui, en tout premier lieu, permet d’instituer le premier impôt mondial de l’histoire humaine… rendant imposables sur le papier, les pauvres comme les riches. Mais ces derniers ayant plus d’un tour dans leur sac s’entendent déjà pour monnayer et truquer leur quote-part [21].

Nombre d’économistes (une corporation qui a souvent un temps de retard sur les événements, on l’a assez vu à l’automne 2008 !) glosent à présent sur la désindustrialisation et le déclin de la puissance américaine ! Mais ces “spécialistes” ont des yeux pour ne pas voir. C’est à se demander comment ils font pour sembler ne pas comprendre de quelle façon fonctionne le monde au XXIe siècle ? Et partant, quelle conception ar44chaïque, académique ou instrumentale du Nouvel Ordre Mondial est la leur pour ne pas mieux lire dans “Copenhague” à cœur ouvert ?

Il importe peu que la manip sur le réchauffement climatique commence à être éventée, ceci tant que la contre-information se trouve confinée sur la Toile et dans la mesure où le mensonge institutionnalisé a la peau dure et même qu’il est quasiment increvable tant qu’il est utile… Entendons par là, la « vérité » imposée par les médias, supports officiels de la pensée unique et de la Novlangue dont le rôle exclusif est de diffuser de la propagande et de la publicité en faveur du Meilleur des Mondes (sous couvert de divertissement)... Deux volets d’une seule et unique réalité [22]. En effet, l’idée d’une menace catastrophique d’ordre climatique (renforcée par de nombreux épisodes récents, cyclones, raz-de-marée, séismes, etc.), inlassablement ressassée et relayée par les télévisions est finalement parvenue à s’enraciner profondément dans l’opinion sur fond de culpabilité diffuse.

Un parallélisme serait d’ailleurs à établir avec les campagnes relatives à l’imminence du collapse climatique et celles liées la pandémie de grippe porcine. Les secondes s’étant développées naturellement sur le terrain psychologique créé et préparé par les premières. Même cause, même effets, car à l’arrivée le « commerce de la peur » s’avère être d’un haut rendement économique et financier : alors que l’industrie pharmaceutique donnait des signes de fléchissement (échéance des brevets pour nombre de molécules appelées sous peu à passer dans le domaine public, celui des “génériques”), l’opportune pandémie et son cortège de frayeurs, est arrivée à point nommé pour relancer la machine. Allelujah !

Jean-Michel Vernochet
17 février 2010

Dernier livre paru : « Europe, chronique d’une mort annoncée ». Éditions de l’Infini.
http://www.editions-infini.fr/

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ANNEXES

On a beaucoup parlé d’une intervention du Fonds monétaire international pour venir au secours de la Grèce dont l’économie cependant n’est guère plus mal en point que celle des États-Unis… à ceci près, que la petite Ellade n’a pas la faculté, à la différence de la Grande Amérique, d’émettre autant de papier monnaie qu’utile ou nécessaire.

Avec une dotation d’intervention supplémentaire de quelque 100 milliards de $ la création d’un « fonds vert » (doté d’un montant pouvant aller jusqu’à 100 milliards de dollars par an) destiné en principe à aider les pays à faire face aux changements climatiques », le Tiers-monde et les éclopés de l’économie d’abondance et de l’argent gratuit (tels la Grèce, l’Espagne, le Portugal et tutti quanti) en réalité conviés à co-gérer leur propre domination et l’affermissement d’organismes supranationaux, à l’instar du FMI, dans leur rôle de tutorat mondialiste.

Le Fonds Monétaire International
Esquisse d’une stratégie globale, de Davos à Herzliya

Lors de la session du Forum économique mondial de janvier 2010 à Davos, M. Strauss-Kahn a développé l’idée selon laquelle « ce ne sont pas seulement les pays en développement qui n’ont pas les moyens de lutter contre le réchauffement climatique, mais également les pays développés dont les capacités sont également limitées par d’importantes contraintes budgétaires nées de et avec la crise économique »… Rappelant par la même occasion que « le nouveau modèle de croissance économique devait être faible en émissions de gaz à effet de serre ».

Les moyens financiers de lutte contre le réchauffement climatique ( lequel ne saurait donc être désormais remis en question : il s’agit d’une vérité révélée, un dogme intangible, incontestable, non réversible, le sceau d’une nouvelle vulgate) proviendraient de Droits de Tirages Spéciaux (DTS) émis par le FMI depuis 1969 pour alimenter les trésoreries nationales. M. Strauss-Kahn a, de cette façon, avancé le chiffre mirobolant de 100 milliards de dollars destinés à rendre les économies moins consommatrices en énergies polluantes.

Sous couvert d’allocations d’aide au Tiers-monde, le FMI acquérrait par ce biais la capacité de mettre sous tutelle la plupart des États qui, dans la sphère occidentale ou ailleurs, pourraient montrer quelques signes de défaillance. Une montée en puissance de cette institution internationale qu’il faut interpréter comme participant de la construction de cette gouvernance mondiale s’établissant sous nos yeux et dont la nécessité est présentée comme devant s’imposer dans le contexte de la crise multiforme qui est le nôtre actuellement : crise financière, économique, sociale, sociétale, alimentaire, sanitaire, environnementale, climatique… Des crises interconnectées pour ne pas dire qu’elles forment peut-être, au moins en partie, une seule et même crise… Or à défi global, réponse globale, comme l’avait énoncé de manière limpide le Belge Paul-Henri Spaak, l’un des pères fondateur de l’Union européenne qui fut en 1957 le second Secrétaire général de l’Otan.

Lors du sommet de Davos, le président français, M. Sarkozy, dans son allocution d’ouverture tint à appuyer les propositions de réforme bancaires du président américain, Barack Obama (lequel souhaite, entre autres, une limitation de la taille des banques américaines sans aller cependant jusqu’à vouloir séparer banques d’investissement et banques commerciales). Allant plus loin, M. Sarkozy, s’est quant à lui déclaré en faveur d’un resserrement, au niveau mondial, de la réglementation applicable aux établissements financiers ainsi que des règles comptables, en particulier en ce qui concerne la capitalisation des institutions financières. Or, il faut lire ces déclarations au regard de l’intervention de M. Strauss Kahn, Directeur du Fonds Monétaire International, à la Conférence d’Herzliya relative la sécurité de l’État hébreu (février 2010), conférence qui suivit immédiatement le sommet de Davos…

Un discours qui sonne à la fois comme un avertissement et un plaidoyer en faveur d’un renforcement des moyens d’action du FMI, financiers mais aussi de « conseils ». Traduit en langage ordinaire, les « conseils » sont la version actualisée de ces plans dits d’ajustement structurel qui naguère étaient censés redresser les économies chancelantes des pays en développement surendettés grâce à la corruption d’élites compradores. M. Strauss-Kahn nous dit en outre, au fil de son propos, que la crise, loin d’être achevée, rôde le spectre de la guerre, qu’il est donc un urgent besoin de créer les structures d’intervention, autrement dit d’installer des instances de pilotage internationales, notamment par le truchement d’institutions de régulation. On ne saurait être plus clair : à Marché global, gouvernance mondiale.

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Dominique Strauss Kahn,
Directeur du Fonds Monétaire International
Conférence d’Herzliya sur la sécurité de l’État israélien, février 2010

Extraits de la version communiquée à la presse (différente du texte original)

….Garantir la stabilité

Permettez-moi de souligner que la crise n’est en aucun cas terminée, et que de nombreux risques subsistent…. Et même si la croissance repart, il faudra du temps pour que l’emploi fasse de même. Cette instabilité économique continuera de menacer la stabilité sociale.

Les enjeux sont particulièrement élevés dans les pays à faible revenu… pas moins de 90 millions de personnes pourraient sombrer dans la misère à cause de la crise. Dans de nombreuses régions du monde, ce n’est pas seulement de hausse du chômage ou de baisse du pouvoir d’achat qu’il s’agit, mais vraiment d’une question de vie ou de mort. La marginalisation économique et l’indigence pourraient entraîner des troubles sociaux, des désordres politiques, une faillite de la démocratie, ou la guerre. Dans un sens, les efforts que nous déployons collectivement pour combattre la crise ne peuvent être distingués de ceux déployés pour préserver la stabilité sociale et obtenir la paix.

Au sujet de la guerre, on pourrait à raison parler de « développement négatif ». La guerre entraîne des morts, des invalidités, des maladies et des déplacements de population. La guerre accroît la pauvreté. La guerre réduit le potentiel de croissance en détruisant des infrastructures, ainsi que du capital financier et humain. La guerre détourne les ressources vers la violence, la recherche de rente et la corruption. La guerre affaiblit les institutions. La guerre dans un pays nuit aux pays voisins, notamment par des afflux de réfugiés.

… Il est difficile d’estimer le véritable coût d’une guerre civile. Selon des études récentes, une année de conflit peut amputer la croissance d’un pays de 2 à 2 1/2 points de pourcentage. Comme une guerre civile dure en moyenne sept ans, cela signifie une perte de 15 % par rapport à une période de paix…

La causalité marche aussi dans l’autre sens. Tout comme une guerre a des effets dévastateurs sur une économie, un pays économiquement faible est plus exposé à une guerre. Les données sont assez claires à ce sujet : un revenu faible ou une croissance économique lente accroît le risque d’un conflit civil. La pauvreté et la stagnation économique entraînent la marginalisation, dont les victimes n’ont plus de place dans l’économie productive. N’ayant guère d’espoir de trouver un travail ni de s’assurer un niveau de vie raisonnable, ces marginalisés risquent de se tourner vers la violence. La dépendance à l’égard des ressources naturelles constitue aussi un facteur de risque : la compétition pour le contrôle de ces ressources peut provoquer des conflits et le revenu des ressources naturelles peut financer des guerres.

… Quel est le rôle du FMI à cet égard ? De manière générale, il peut aider les pays à préserver ou à consolider la stabilité économique. À cet effet, le moyen le plus évident est de fournir un financement si besoin est. Faute de quoi, le gouvernement pourrait être obligé de réduire la protection sociale et les services publics de base. L’activité économique risque d’être davantage perturbée, et les possibilités d’emploi réduites. Dans ce domaine, le FMI joue son rôle : son appui aux pays à faible revenu pour les deux prochaines années sera trois fois ce qu’il était avant la crise. Et pour alléger la charge de ces pays, tous nos prêts concessionnels seront sans intérêt jusqu’à la fin de 2011.

… Le FMI accorde aussi beaucoup d’importance à une bonne gouvernance. Environ 40 % des conditions dont sont assortis les programmes que nous appuyons dans les pays à faible revenu mettent l’accent sur l’amélioration de la gestion des ressources publiques et la responsabilisation. Nous fournissons aussi des conseils et de l’assistance technique aux pays riches en ressources naturelles, pour les aider à mieux gérer leurs recettes, ce qui de nouveau contribue à la stabilité sociale.

Le mandat du FMI

J’en reviens à mon point principal. Lorsque les nations du monde joignent leurs forces pour affronter les problèmes communs dans un esprit de solidarité, il est possible d’enclencher le cercle vertueux de la paix et de la prospérité, et d’éviter le cercle vicieux des conflits et de la stagnation. À première vue, cela peut sembler accessoire au rôle du FMI. Au contraire, cela étaye notre mandat.

Pour mieux comprendre, examinons les origines du FMI et les enseignements du XXe siècle. Les nations du monde se sont réunies après la première guerre mondiale. Mais au lieu de promouvoir la coopération économique, elles étaient motivées par des considérations à courte vue. En particulier, la sévérité des modalités du Traité de Versailles a conduit à la ruine de l’économie allemande, l’une des causes de la Seconde Guerre mondiale.

John Maynard Keynes, l’un des fondateurs du FMI, l’avait bien compris. Il a condamné vigoureusement « la politique consistant à réduire l’Allemagne à la servitude pendant une génération, à avilir des millions d’êtres humains », et il a engagé vivement la société à « fonder son action sur de meilleures attentes, et à croire que la prospérité et le bonheur d’un pays favorisent la prospérité et le bonheur des autres pays, que la solidarité de l’homme n’est pas une fiction ».

L’avertissement de Keynes a été ignoré. Les pays ont préféré défendre leur intérêt personnel et se sont réfugiés dans l’isolationnisme. Il s’ensuivit l’effondrement sans précédent de l’activité économique mondiale dans les années 30, avec de sombres conséquences sociales et politiques. La guerre économique a vite conduit à la vraie guerre, et la Seconde Guerre mondiale a fait des dizaines de millions de victimes et dévasté de nombreux pays.

Après la guerre, les nations du monde se sont réunies de nouveau. Elles se sont engagées à ne plus jamais répéter les erreurs du passé. Elles ont souscrit au multilatéralisme et ont décidé de coopérer dans les domaines économique et financier. Les dirigeants souhaitaient créer un monde nouveau

C’était une stratégie à dimensions multiples. Les Nations Unies ont été fondées pour « préserver les générations futures du fléau de la guerre » tout en favorisant « le progrès social et de meilleures conditions de vie ». En Europe, les dirigeants ont engagé un processus remarquable d’intégration économique et politique. Ils étaient déterminés à bannir pour toujours du continent le spectre de la guerre et à réaliser le rêve de la « paix perpétuelle » — ce grand rêve de tant de philosophes au fil des siècles, parmi lesquels Saint-Pierre, Rousseau, Bentham et Kant. Rappelez-vous aussi que la paix a été favorisée par une aide financière extérieure, avec le plan Marshall, et intérieure, avec la mise en place de vastes dispositifs de protection sociale. C’est la stabilité économique et sociale qui a consolidé la paix.

Le FMI a été créé à ce moment décisif de l’histoire, dans une ambiance multilatérale tournée résolument vers la paix et la coopération. Il a reçu pour mandat d’assurer la stabilité économique, en encourageant la coopération monétaire et en facilitant une expansion du commerce et de l’emploi qui profite à tous. Il a été chargé de surveiller le système financier mondial et d’accorder des prêts aux pays membres ayant des besoins de financement de leur balance des paiements. Avec la stabilité viendraient la paix et la sécurité, pensait-on.

Lorsque les pères fondateurs se sont réunis à Bretton Woods en 1944, la paix figurait au premier rang de leurs priorités. Le pessimisme de Keynes vingt-cinq ans plus tôt s’était transformé en optimisme. À la fin de la conférence, Keynes a déclaré que, en œuvrant tous ensemble, « ce cauchemar, dans lequel la plupart d’entre nous avons passé une trop grande partie de notre vie, prendra fin ». Signe des temps, il était convaincu que « la fraternité des hommes ne serait plus un vain mot ». Henry Morgenthau, Secrétaire du Trésor américain, était du même avis, liant la paix à la prospérité partagée et dénonçant les politiques économiques de l’entre-deux-guerres. Selon lui, « l’agression économique ne peut déboucher que sur la guerre. Elle est aussi dangereuse que futile. Nous savons qu’il y aura un conflit économique lorsque des pays s’efforcent chacun individuellement de s’attaquer à des maux économiques dont la portée est internationale ». C’est notre héritage, et c’est de là que provient notre mandat.

Une occasion historique nous est donnée aujourd’hui de renouveler cet attachement au multilatéralisme et de l’adapter au monde de l’après-crise. Nous devons tous ensemble relever ce défi. La paix de notre planète en dépend…

Notes

[1Cf. James Burnham. « L’ère des managers » 1947

[2En Amérique du Nord la résorption du chômage et la sortie de l’économie de guerre ne fut pas chose facile ; l’Europe quant à elle connaît de dures restrictions jusqu’en 1947 (elles ne s’achèvent totalement qu’en 1949) et des rationnements alimentaires plus sévères que pendant les années de guerre elles-mêmes. Loin des grandes déclarations idéalistes que l’histoire a retenues (lesquelles relevaient essentiellement de la propagande de crise) et qui ont servi de matériaux à l’édification d’une vision idyllique de l’engagement américain prévalant encore aujourd’hui ; en réalité la guerre aura été pour les États-Unis le moyen, parmi d’autres mobiles plus ou moins nobles, de fuir vent arrière un probable retour de crise.

Si l’on veut apprécier à sa juste valeur l’engagement des États-Unis contre la « barbarie nazie », outre les puissants intérêts unissant l’establishment industriel américain et le régime national-socialiste, il faut garder en mémoire que Washington ne leva que très tardivement l’embargo auquel étaient soumis Anglais et Français depuis 1er Neutrality Act de 1935. Le 3 septembre 1939, lorsque l’Angleterre puis la France déclare la guerre au IIIe Reich, Roosevelt confirme à nouveau encore la « neutralité » de l’Amérique, neutralité qui s’accompagne d’un embargo total sur les armes et les munitions. Mais la campagne électorale des élections présidentielles de novembre 1940 commençant et sous la pression de membres influents de l’establishment financier, malgré une forte opposition du Congrès et de l’opinion, Roosevelt fait passer le 4 novembre 1939 la loi Cash and Carry permettant d’assouplir l’embargo ; loi qui, comme son nom l’indique, implique des paiements comptant à la livraison. Réélu pour un troisième mandat sur le slogan « America first », Roosevelt ira à contresens de sa majorité en cédant au prix fort cinquante destroyers à la Royal Navy en échange de bases britanniques dans l’Atlantique. Il faudra attendre fin 1940, et la défaite franco-anglaise, pour que Roosevelt commence à prendre fait et cause pour son allié britannique.

[3L’Alliance bolivarienne (l’Alba qui regroupe le Vénézuéla, la Bolivie, l’Equateur, le Nicaragua, le Honduras, Cuba, la Dominique, Saint-Vincent, les Grenadines et Antigua-et-Barbuda pour une population d’environ 74 millions de personnes et un Produit Intérieur Brut d’approximativement 461 000 millions de dollars.) le 24 juin 2009 décidait à Maracay de la création du « Sucre » (Système Unique de Compensation Régionale), comme future monnaie d’échange ? L’Irak en 2000 décida de recourir à l’Euro pour ses transactions pétrolières (ce qui constitua un indéniable casus belli pour les États-Unis) et fut suivi sur ce terrain glissant par l’Iran en décembre 2006 puis par Vénézuéla, et les Émirats Arabes Unis ont également affirmé leur volonté de coter leurs hydrocarbures en euros, ceci afin de réduire leur dépendance vis-à-vis du dollar. De son côté la Corée du Nord avait adopté en décembre 2002, l’Euro comme moyen unique de règlement pour ses échanges commerciaux. En mars 2007, la Russie a également amorcé un rééquilibrage de ses réserves au profit de l’Euro, celui-ci passant alors de 10% à 20% dans le panier de devises utilisé pour déterminer le taux de change du rouble. Une tendance depuis lors suivie par la Chine et la Corée du Sud. Récemment, l’Organisation de Coopération de Shanghai réunie en juin 2009 à Iekaterinbourg envisageait la création d’une monnaie à vocation universelle.

[4En France, la fiscalité écologique ou fiscalité verte en 2009 représentait 2,1% du produit intérieur brut. La « contribution climat énergie », plus connue sous le nom de taxe-carbone devant être mise en œuvre en 2010. L’on sait qu’elle fut rejetée par le Conseil d’État. Déjà en 2000, Dominique Voynet alors ministre de l’Environnement avait fait voter une taxe carbone s’appliquant à l’énergie suivant le principe pollueur-payeur. Mal conçu le texte est refusé par le Conseil constitutionnel. Le projet visait à étendre la Taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) aux consommations intermédiaires d’énergie et appréciée en fonction de la teneur en carbone de chaque produit avec un taux de référence de 11 euros la Tonne de dioxyde de carbone. Dominique de Villepin à son tour propose en novembre 2006 « de taxer les importations venant de pays qui ne respectent pas Kyoto (protocole prévoyant la réduction des gaz à effet de serre) de droits de douanes spécifiques supplémentaires ». Proposition rejetée en décembre par le commissaire européen au Commerce, Peter Mandelson parce qu’elle lui semble « presque impossible à mettre en œuvre… problématique au regard des règles de l’OMC ». L’économie-carbone n’en est alors qu’à ses balbutiements et la crise commence seulement à poindre du nez. En septembre 2007, dans le cadre du Grenelle de l’environnement, la Fondation Nicolas Hulot exige la création d’une taxe sur les émissions de CO2, taxe acquittée par les ménages, les administrations et les entreprises non soumises aux quotas d’émissions européens, proposition reprise au bond par l’Élysée. La répartition des rôles fonctionne à plein. En juillet 2009, Michel Rocard rend des conclusions qui confirme une parfaite identité de vues entre la majorité et l’opposition, droite et gauche confondues.

[5Dans l’Union européenne, l’écologie est largement dévoyée par la politique. De réflexion à caractère scientifique et technique, celle-ci est devenue un instrument de manipulation de l’opinion. L’agitateur européo-franco-germanique, Cohn-Bendit, libéral-libertaire par excellence, a ainsi participé à la création d’une chimère politique dont le ramage est gauchisant et le plumage authentiquement libéraliste. À telle enseigne que son discours est à peu de chose près celui que tenait le Président français au sommet de Copenhague et aux rencontres de Davos, en tout cas leurs prémisses sont les mêmes. L’écologie politique s’occupe bien entendu de tout sauf d’écologie concrète, celle du terrain, en cela elle constitue une cynique usurpation de raison sociale… De même la récupération et le dévoiement de l’écologie à des fins à la fois financières et géopolitiques est un signe des temps. L’économie ultralibérale étant soumise une nécessité permanente de « croissance » (autrement dit, tout fait « bulles »), elle ne peut que produire en excès en raison d’une « demande » plus ou moins irrationnelle ou créée artificiellement, par la publicité, par le crédit, (tels les fameux crédits hypothécaires à risques, un cas d’école), processus selon lequel « on » commence par vendre des biens réels avant de vendre du vent ! Ceci étant vrai de toutes les grandes escroqueries de Panama à Enron via Stavisky, Hanau et Madoff & Cie

[6Dernière et géniale trouvaille, les “Occidentaux” se mettent à vendre du “vent”, un commerce qui s’annonce très lucratif. Nous ne parlons évidemment pas ici des seules éoliennes qui semblent être une autre arnaque ou une autre fumisterie (leur rendement maximal théorique serait de 59 %, et sauf sites exceptionnels, le rendement moyen n’est évalué qu’à 35%). Les parcs éoliens installés aux É-U en 2007 ont rapporté 2,75 milliards de dollars en 2007, supérieurs aux coûts totaux des aides publiques consenties sous forme de “crédits d’impôts” qui étaient de 2,5 milliards, d’où une recette nette pour le Trésor américain de 250 millions de dollars. Des revenus fiscaux de plus en plus importants au fil des ans : environ 400 millions de dollars de taxes annuelles à partir de 2013 et 2025 (Cf.Steve Taub, vice-président de GE Energy Financial Services). Le “vent” serait ce fameux carbone fauteur d’effet de serre, alors que l’homme ne serait redevable que d’un pour cent (1%) de l’effet de serre naturel.

[7Pierre Theilard de Chardin « La Place de l’Homme dans la Nature » 1965 ▪ Konrad Lorenz « L’Homme dans le fleuve du vivant » 1981.

[8Il existe un antagonisme non de principe, entre libertés individuelles et le développement du marché libre, mais d’ordre systémique : les États se voient contraints de « contenir » les conséquences de l’expansion globalisante du Marché. Ainsi il s’agit de contenir, voire de réprimer les mouvements sociaux nés de la destruction des emplois liés aux « restructurations » et à des délocalisations de la production (à l’échelle mondiale) vers des zones (l’Asie) où le coût de la main d’œuvre est environ vingt fois moins élevé qu’en Europe. À ce titre la tardive démarche de ratification en février 2010, par la France, du traité d’octobre 2007 portant création d’une force de gendarmerie européenne est à placer dans la perspective d’une instabilisation croissante de populations touchées par la crise économique (elle-même considérée comme un épiphénomène, un accident de parcours, inscrit génétiquement dans la logique d’expansion du système ultralibéral) ; avec, dans l’immédiat au printemps 2010 un éventuel embrasement social de la Grèce dont la faillite (inédite pour un État) et la mise sous tutelle par l’UE sont des faits désormais acquis. Peu à peu – notamment à propos du contrôle des flux migratoires, clandestins ou non, ou encore de la lutte dite anti-terroriste – une réaffectation des forces de sécurité s’avérera de plus en plus nécessaire pour assurer la gestion des nuisances sociales nées de la « globalisation »… depuis la déstructuration de sociétés traditionnelles au bord de l’implosion, jusqu’à la conduite de guerres néo-impérialistes pour le contrôle des sources d’énergies fossiles et de matières premières. Dans un tel contexte, les libertés individuelles se verront réduire proportionnellement à libéralisation des marchés marquant l’expansion et l’unification du Marché.

[9Autant il est urgent d’intervenir contre les ravages d’un ultralibéralisme et d’un hypercapitalisme sans âme, autant il serait opportun d’effectuer une rupture épistémologique définitive avec les systèmes idéologiques anticapitalistes prônant le communisme (l’organisation collectiviste de la production) ainsi que toutes les variantes de socialisme d’inspiration marxiste. Doctrines qui, sous des dehors de justice sociale, recréent aussitôt inéluctablement et sous une autre forme un « capitalisme » particulièrement dévastateur. En l’occurrence un capitalisme centralisé, un monopole d’État aux mains d’une nomenklatura qui est également une « privilegiatura ». Un capitalisme pourtant toujours basé, et pour toujours, sur les même règles de physique sociétale inhérentes à la nature humaine : des différences (des inégalités !) de capacités et de caractère entre les individus qui font qu’il y aura et pour longtemps encore des camarades-patrons donnant des ordres à des camarades-ouvriers, autrement dit des « égaux plus égaux que d’autres » [[cf. George Orwel,« Animals farm »

[10Lula da Silva, fils de docker, est issu d’une famille de huit enfants, ouvrier métallo puis syndicaliste trotskyste. Élu président du Brésil à la quatrième tentative, il s’est montré d’un pragmatisme exemplaire en se convertissant aussitôt à l’économie de marché à l’instar de son premier ministre de l’économie, Antonio Palocci, lui aussi ancien trotskiste. Sans toutefois s’éloigner de ses amis altermondialistes qui lui doivent la « démocratie participative » - comme si la démocratie pouvait être autre chose que « participative » ? - concept repris à « droite » comme à « gauche » et pour cause puisqu’il n’est qu’une transposition dans le politique du « management participatif » lequel n’est autre dans le domaine de la gestion des entreprises qu’une application des techniques de manipulation des groupes, développées dans des buts d’agitation et de propagande par les trotskistes eux-mêmes. En raccourci, démocratie ou management participatifs reviennent à faire participer ou associer le sujet à sa propre sujétion.

[11Au Brésil, en dépit des déclarations fracassantes de la Présidence, pour la période 2003-2004 ce sont 26 130 km2 soit 20% de la forêt amazonienne qui ont été détruits. La grande selve abrite 30% des espèces recensées, animales et végétales, de la planète. Dans les zones de déforestation, les températures de la saison sèche auraient crû de 1 à 3 °C d’après l’Institut national brésilien de recherches spatiales (INPE)). Quant au chercheur Pedro Leite Silva Dias de l’Université de São Paulo, celui-ci établit une relation « entre les anomalies pluviales en Europe et aux États-Unis et la déforestation en Amazonie ». Conclusions reprises par Brian Kaskins, de la Reading University (Grande-Bretagne) qui, après vingt ans d’observation, a établi l’existence d’une relation entre les anomalies des moussons du sous-continent indien, les inondations en Europe, la sécheresse en Australie et les modifications environnementales massives en cours dans le Bassin amazonien.

[12C’est vraisemblablement en 1840, lorsque François Pierre Guillaume Guizot était l’homme fort du gouvernement, qu’il aurait prononcé sa phrase célèbre : « Éclairez-vous, enrichissez-vous, améliorez la condition morale et matérielle de notre France ». Phrase rapportée ultérieurement (à l‘occasion d’un débat sur le vote censitaire) sous la forme qui passera à la postérité : « Enrichissez-vous par le travail et par l’épargne et vous deviendrez électeurs ».

[13En février 2010 la chaîne de télévision franco-allemande a diffusé une série passionnante relative aux biographies de self-made-men qui, partis de rien (et d’Allemagne), construisirent au XIXe siècle aux États-Unis des empires industriels sur les bases d’un capitalisme éthique : Heinz (Ketchup), Steinway (pianos) renvoient aux maîtres de forges Siemens en Allemagne et le français Schneider (se prononce Schneidre), pour ne citer que ces quatre noms.

[14Créé en 1988, le Giec (Intergovernmental Panel on Climate Change) est un Organe intergouvernemental affilié à l’ONU chargé à la demande du G7 de synthétiser les travaux sur le changement climatique. Dans son dernier rapport publié en 2007 (le prochain est attendu en 2013), le GIEC indiquait une probabilité d’environ 90 %, pour que l’Homme soit le principal responsable du changement climatique. En réalité son incidence ne dépasserait 1% dans l’effet de serre naturel qui aurait contribué à une augmentation d’environ 0,5 °C de la température moyenne de notre planète au cours de la seconde moitié du vingtième siècle.
C’est sur la base de ce rapport de 2007 que les chefs d’États et de gouvernement se sont engagés au sommet de Copenhague à prendre les mesures nécessaires pour limiter le réchauffement climatique à +2°C. Le 14 février 2010, le Giec reconnaissait cependant par la bouche de Phil Jones, directeur du Climate Research Unit, en un demi-aveu d’incompétence voire de falsification, que « certaines données climatiques n’avaient pas été assez bien organisées » ( !) tout en rejetant cependant l’accusation de manipulation. Toujours est-il que le 20 décembre 2009, le quotidien conservateur anglais, Telegraph accusait le directeur du Giec, Rajendra Pachauri, d’avoir profité de position directoriale au GIEC et de directeur du TERI (The Energy and Resources Institute) pour conseiller des firmes pétrolières et des banques investissant dans le commerce des crédits carbone, où il siégeait à leur conseil d’administration. Last but not least, le 19 novembre 2009, peu avant le sommet de Copenhague, un fichier comportant 4 000 courriels et documents provenant des ordinateurs du CRU de l’université britannique d’East Anglia, est posté sur le site The Air Vent. Le Giec est alors accusé, sur la base de données précises de manipuler les chiffres afin d’accréditer la thèse d’un réchauffement climatique d’origine anthropique.

[15L’idée de « développement durable » apparaît officiellement en 1989 dans le rapport « Brundtland », Premier ministre norvégien de l’époque. Ce « rapport », utilisé dans la préparation du « Sommet de la Terre » de Rio en 1992 à Rio, présente le développement durable comme la base d’une possible politique internationale de l’environnement. Rédigé dans une perspective « utilitariste » (faites le bien pour mieux servir vos propres intérêts), le rapport inverse l’opposition classique entre croissance économique et préservation des milieux naturels, en établissant a contrario une complémentarité, voire une synergie dynamique, entre les deux. Il s’agirait d’ailleurs de repréciser le contenu du « concept » de croissance en ce que beaucoup le confondent avec l’idée de « progrès », alors que la croissance ne mesure strictement qu’un volume transactionnel.

[16Ainsi, à titre d’exemple, les mécanismes du « Crédit carbone » (autrement appelés “cap & trade” par les anglophones - à ne pas confondre avec la Taxe carbone qui s’applique aux consommateurs - ouvrent d’ores et déjà d’alléchantes perspectives. Il s’agit d’un mécanisme lié à l’attribution de quotas de CO2, autrement dit d’un “droit à polluer” par lequel les entreprises qui n’épuiseront pas leur quote-part, seront autorisées à les vendre. Ces crédits carbone représenteraient aujourd’hui en Europe, 90 milliards d’euros en transactions. Ce commerce totalement immatériel (de simples jeux d’écriture) donne lieu dès à présent à des fraudes massives : la TVA, à laquelle les transactions carbones sont assujetties, est récupérée (sans avoir été payée), en bout de chaîne par le bénéficiaire de la dernière transaction, ceci via de multiples sociétés écran dispersées à travers l’Europe. Un nouveau secteur commercial et une nouvelle “niche” fiscale sont donc nés pour une « denrée » fictive… une pure construction de l’esprit toujours fécond des faiseurs de marchés. Le sommet de Copenhague devrait, en toute logique, ouvrir la voie à une mondialisation de ce marché si juteux pour des droits d’émission dont la valeur se chiffre potentiellement en milliards de milliards d’euros.

[17voir note 6

[18Entendons ici par idéologies une représentation ou une interprétation fallacieuses des choses, des événements et des situations en vue de légitimer des intérêts, à savoir une démarche d’acquisition de pouvoir. La construction idéologique vise en outre à discréditer, disqualifier, exclure d’entrée de jeu ses adversaires de par sa forme péremptoire, sa posture d’autorité signalant une nature à vocation intrinsèquement totalitaire. Il va de soi que l’écologie s’inscrit dorénavant au catalogue des outils de contention sociale du politiquement correct.

[19Intervention du président Hugo Chavez à Copenhague – Extraits : « … Monsieur le Président, le changement climatique est sans aucun doute le problème environnemental le plus dévastateur de ce siècle : inondations, sécheresses, tempêtes sévères, ouragans, dégel ; montée du niveau moyen de la mer, acidification des océans, vagues de chaleur… Tous ceci aggrave l’impact des crises mondiales qui s’abattent sur nous. L’activité humaine actuelle dépasse le seuil du développement durable et met en danger la vie sur la planète.

Mais, je tiens à le souligner, nous sommes là aussi profondément inégaux. Les 500 millions de personnes les plus riches, soit 7%, sept pour cent, de la population mondiale, ces 7% sont responsables de 50% des émissions polluantes, alors que la moitié la plus pauvre de la population de la planète – la moitié, 50% – n’émet que 7% des gaz polluants. Voilà pourquoi je m’étonne : il me paraît bizarre de solliciter ici la Chine et les États-Unis dans les mêmes termes. Les États-Unis comptent peut-être 300 millions d’habitants, et la Chine, cinq fois plus. Les États-Unis consomment plus de 20 millions de barils de pétrole par jour, et la Chine arrive à peine à 5 ou 6 millions. On ne peut pas demander la même chose aux États-Unis et à la Chine. Voilà un sujet qui mérite discussion cartes sur table…

En outre, Monsieur le Président, 60% des écosystèmes de la planète sont endommagés, et 20% de l’écorce terrestre est dégradée. Nous avons été les témoins impassibles de la déforestation, de la conversion de terres, de la désertification, des altérations des systèmes d’eau douce, de la surexploitation des ressources marines, de la contamination et de la perte de la diversité biologique. La surexploitation de la terre dépasse de 30% sa capacité de régénération. La planète perd sa capacité d’autorégulation, elle est en train de la perdre. Nous produisons chaque jour bien plus de déchets que nous ne sommes capables d’en traiter.

La survie de notre espèce est une question qui hante la conscience de l’humanité. Malgré l’urgence, deux années de négociations se sont écoulées pour élaborer une seconde série d’engagements sous le Protocole de Kyoto, et nous participons à cette réunion sans être parvenus à un accord réel et significatif… il est indispensable de parvenir à un nouvel et unique accord applicable à des parties absolument inégales, par l’ampleur de leurs contributions et de leurs capacités économiques, financières et technologiques, et basé sur le strict respect des principes énoncés dans la Convention.

Les pays développés devraient contracter des engagements contraignants, clairs et concrets de réduction de leurs émissions, et assumer des obligations d’assistance financière et technologique aux pays pauvres, pour faire face aux dangers destructeurs du changement climatique. A cet égard, la situation particulière des États insulaires et des pays les moins développés devrait être pleinement reconnue…

[Cependant] le changement climatique n’est pas le seul problème qui frappe aujourd’hui l’humanité. D’autres fléaux et d’autres injustices nous guettent. Le fossé qui sépare les pays riches des pays pauvres n’a cessé de se creuser en dépit de tous les Objectifs du millénaire, du Sommet de Monterrey sur le financement, de tous ces sommets, comme le faisait remarquer ici le président du Sénégal, qui dénonçait une grande vérité : les promesses, tant de promesses non tenues, alors que le monde continue sa marche destructrice.

Le revenu total des 500 individus les plus riches du monde est supérieur au revenu des 416 millions de personnes les plus pauvres. Les 2,8 milliards de personnes qui vivent dans la pauvreté, avec moins de deux dollars par jour et qui représentent 40% de la population mondiale –je dis bien 40% de la population de la planète !– se partagent seulement 5% du revenu mondial. Aujourd’hui, environ 9,2 millions d’enfants meurent avant l’âge de cinq ans, et 99,9% de ces décès ont lieu dans les pays les plus pauvres. La mortalité infantile est de 47% décès pour 1 000 naissances vivantes ; mais elle est de 5 décès seulement dans les pays riches. L’espérance de vie sur la planète est de 67 ans, mais de 79 ans dans les pays riches et de 40 ans seulement dans certains pays pauvres. [Enfin] il existe 1,1 milliard d’habitants privés d’accès à l’eau potable ; 2,6 milliards sans services sanitaires et plus de 1,02 milliard de personnes affamées. Tel est le tableau actuel du monde.

Mais, et la cause ?... Et bien, la cause c’est le rêve de vouloir chercher le bonheur à travers l’accumulation matérielle et du progrès sans fin, en recourant à la science et à la technique, avec lesquelles on peut exploiter de manière illimitée toutes les ressources de la Terre »… « Une Terre finie peut-elle supporter un projet infini ? ». La thèse du capitalisme du développement infini est un modèle destructeur… [Alors] Que pouvons-nous attendre de Copenhague ? À peine ce simple aveu : nous ne pouvons plus continuer ainsi, et un objectif simple : nous allons changer de cap ? Faisons-le, mais sans cynisme, sans mensonges, sans doubles agendas, sans documents issus du néant, et avec la vérité comme valeur ultime.

[20À ce propos, ne parlons plus de “médias aux ordres” car cela supposerait que les journalistes jouissent encore d’une certaine liberté sur les sujets sensibles, qu’ils seraient de ce point de vue contraints, sous diverses pressions, d’aller contre leurs convictions intimes. Cassons ce mythe : le journaliste libre n’existe pas dans le “système” qui ne recrute, sauf bévue, que des hommes – et des femmes – qui sont formatés pour devenir, plus ou moins consciemment, des falsificateurs professionnels, ne serait-ce que par « omission » ou ignorance... D’où la haine de ces marchands de billevesées pour la “fosse sceptique du net” - selon leur élégante terminologie - qui met à nu leur sinistre attitude.

[21voir note16

[22voir note 18

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