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Les ventes d’armes en Israël imposent le silence de la communauté internationale

mardi 14 novembre 2023

Depuis la Seconde Guerre mondiale, les civils ont été les principales victimes des conflits armés. Meurtres, mutilations, torture, prises d’otages, atteinte à la dignité des personnes, arrestations arbitraires… Toutes ces formes de violences sont interdites par le droit international humanitaire.
Selon la convention (IV) de Genève, plus particulièrement, porte sur la protection des personnes civiles en temps de guerre. Le texte aborde la protection des populations contre certains effets de la guerre mais laisse de côté la question de la limitation de l’emploi des armes.
La convention IV prévoit que, dans le cadre d’un conflit international, les personnes civiles doivent être protégées en toutes circonstances et ont droit "au respect de leur personne, de leur honneur, de leurs droits familiaux, de leurs convictions et pratiques religieuses, de leurs habitudes et de leurs coutumes. Elles seront traitées, en tout temps, avec humanité et protégées notamment contre tout acte de violence ou d’intimidation, contre les insultes et la curiosité publique.
Les femmes seront spécialement protégées contre toute atteinte à leur honneur, et notamment contre le viol, la contrainte à la prostitution et tout attentat à leur pudeur.
Compte tenu des dispositions relatives à l’état de santé, à l’âge et au sexe, les personnes protégées seront toutes traitées par la Partie au conflit au pouvoir de laquelle elles se trouvent, avec les mêmes égards, sans aucune distinction défavorable, notamment de race, de religion ou d’opinions politiques".

Israël a toujours nié le droit international tout en gardant une influence disproportionnée pour un si petit pays. La grogne contre le premier ministre Benyamin Nétanyahou ne cesse de prendre de l’ampleur en Israël. Près de 80 % des participants à un récent sondage estiment qu’il est partiellement responsable des évènements.

L’Europe assisterait-elle Israël dans son conflit avec le Hamas en lui livrant des armes ?

Des données communiquées à Euronews montrent que plusieurs États européens ont fourni des armes et des équipements clés susceptibles d’être utilisés par l’armée israélienne dans son offensive.
Dans une lettre de quatre pages publiée récemment, Craig Mokhiber, ancien fonctionnaire de l’ONU, a critiqué la communauté internationale pour son incapacité à empêcher un « génocide qui se déroule sous nos yeux », à Gaza.
L’avocat américain spécialiste des droits de l’homme a accusé les États-Unis, le Royaume-Uni et une grande partie de l’Europe d’être « totalement complices de l’horrible assaut » des forces israéliennes contre l’enclave palestinienne, après l’attaque du Hamas contre Israël, le 7 octobre dernier.

Israël a riposté par des frappes incessantes sur Gaza et par l’envoi de troupes et de chars, faisant plus de 9 000 morts à ce jour, selon les autorités palestiniennes.

Des informations communiquées à Euronews montrent aujourd’hui que les Etats européens sont susceptibles d’aider et d’assister directement l’offensive israélienne.

L’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (SIPRI) a fourni des données sur les ventes d’armes de l’Europe à Israël entre 2013 et 2022, montrant que l’Italie et l’Allemagne avaient fourni à l’armée israélienne des armes et des équipements cruciaux qu’elle utilise maintenant sur le terrain à Gaza.

Le Royaume-Uni, quant à lui, a conclu des accords lucratifs avec l’armée de l’air israélienne, selon la Campagne contre le commerce des armes (CAAT).
Toutefois, le groupe indique à Euronews que les accords de licence opaques signifient qu’il peut être difficile de déterminer exactement ce qui a été transféré.

Le SIPRI, un institut de recherche indépendant basé en Suède, a indiqué que l’Allemagne avait envoyé plus de 1 000 moteurs de chars à Israël.
En vertu d’une licence d’exportation datant de 2000, ces moteurs auraient été utilisés dans les chars Merkava-4 et les véhicules blindés de transport de troupes (APC) Namer. Des moteurs diesel ont également été fournis pour le véhicule de combat Eitan, produit en Israël.
« D’après nos estimations, certains d’entre eux sont probablement prêts à être utilisés sur le terrain à Gaza », affirme Zain Hussain, chercheur au SIPRI, à Euronews.

Au cours de la dernière décennie, l’institut a indiqué que l’Allemagne a également fourni - et partiellement financé avec l’argent du contribuable - des sous-marins de classe Dolphin et des corvettes Sa’ar pour la marine israélienne, bien qu’ils soient équipés de canons et de missiles israéliens.

  • « Certains de ces navires ont été mis en service [et] ont probablement été utilisés pour bombarder des cibles à Gaza », explique Zain Hussain.
  • « L’Allemagne a financé une partie des achats israéliens de sous-marins et de corvettes comme une forme d’aide militaire à Israël, pour soutenir Israël dans sa défense et comme une sorte de compensation pour les crimes nazis », ajoute-t-il, dans une déclaration envoyée à Euronews.

Il existe également une importante coopération industrielle en matière de défense entre l’Allemagne et Israël, notamment dans le domaine du développement de missiles et d’autres munitions, impliquant des entreprises telles que Rheinmetall, MBDA Deutschland et Krauss-Maffei Wegmann - entre autres, selon le SIPRI.

En octobre, le chancelier allemand Olaf Scholz a annoncé, au parlement de son pays, qu’il avait proposé une aide militaire à Israël.
« En ce moment, il n’y a qu’une seule place pour l’Allemagne : celle d’être aux côtés d’Israël », assure-t-il, aux députés. « Notre propre histoire, notre responsabilité découlant de l’Holocauste, fait qu’il s’agit, pour nous, d’une tâche perpétuelle de défendre la sécurité de l’État d’Israël. »

Bien qu’à une moindre échelle que l’Allemagne, l’Italie a fourni des pièces pour des avions d’entraînement et de combat, notamment le M-346 Master et l’hélicoptère léger AW-119, selon le SIPRI.
Malgré le fait que Rome n’ait pas encore promis de soutien militaire à Israël, la Première ministre italienne, Giorgia Meloni, a exprimé son soutien et sa proximité avec la population israélienne, à la suite de l’attaque du Hamas.
Entre 2013 et 2022, les entreprises italiennes ont vendu des armements d’une valeur de près de 120 millions d’euros à Israël, soit en moyenne 12 millions d’euros par an, selon Pagella Politica.

Les données partagées avec Euronews par la « Campagne contre le commerce des armes » (CAAT) montrent que le Royaume-Uni est également un fournisseur important d’armes à Israël.
Il fournit des composants qui constituent 15 % de chaque avion de combat F35 actuellement utilisé dans le bombardement incessant de Gaza par Israël, qui a touché des écoles, des hôpitaux et des zones résidentielles.
Ils ont estimé de manière « prudente » que cela représentait 336 millions de livres sterling (386 millions d’euros) depuis 2016.

Le groupe a affirmé que les exportations « les plus importantes » se font par le biais de licences ouvertes, ce qui rend difficile de déterminer exactement ce qui est transféré en raison de leur « manque de transparence ».
Le CAAT a signalé plusieurs licences ouvertes « préoccupantes ». Celles-ci « pourraient facilement impliquer » des équipements susceptibles d’être utilisés à Gaza, tels que des équipements, des logiciels et des technologies pour les avions de combat et les hélicoptères, ainsi que des composants pour l’artillerie, les canons navals et les navires de combat, ainsi que des équipements pour les missiles et les munitions et des radars militaires.

  • « Les ventes d’armes à Israël doivent être stoppées immédiatement », déclare Emily Apple, coordinatrice média de CAAT, dans un communiqué envoyé à Euronews.
  • « Israël commet des crimes de guerre contre le peuple palestinien dans son siège et son bombardement de Gaza, provoquant une catastrophe humanitaire et tuant des milliers de civils ».

En envoyant des pièces vitales utilisées pour bombarder la bande de Gaza, elle soutient que le gouvernement et l’industrie britanniques sont « complices de ces crimes de guerre ».

Dans une déclaration envoyée à Euronews, Amnesty International indique qu’elle demande depuis longtemps un « embargo complet sur les armes à destination d’Israël, du Hamas et d’autres groupes armés palestiniens ».

« Nous avons adopté cette position en raison des violations graves des droits de l’homme et du droit humanitaire international qui se produisent depuis des années dans de nombreux conflits », explique, à Euronews, Patrick Wilcken, chercheur sur les questions militaires, de sécurité et de maintien de l’ordre à Amnesty International.
Il assure qu’Amnesty International a rassemblé des preuves de crimes de guerre commis par les forces israéliennes, le Hamas et d’autres groupes armés.

En ce qui concerne les forces israéliennes, il s’agit notamment de « ne pas avoir pris les précautions nécessaires pour épargner les civils, d’avoir mené des attaques aveugles sans faire de distinction entre les civils et les objectifs militaires, ou d’avoir mené des attaques qui auraient pu être dirigées contre des objets civils », selon Patrick Wilcken.

Le Hamas a commis « des exécutions sommaires massives, des prises d’otages et des tirs de roquettes aveugles sur Israël », ajoute-t-il aussi.
Les transferts d’équipements militaires vers Israël sont contraires à la politique de l’UE qui exige « le respect des droits de l’homme dans le pays de destination finale ainsi que le respect par ce pays du droit international humanitaire », déclare Amnesty.
Les articles 6 et 7 du traité sur le commerce des armes interdisent également les transferts lorsqu’il existe un risque prépondérant que les armes soient utilisées pour commettre ou faciliter une violation grave du droit humanitaire international.

« Les États qui continuent de transférer des armes à Israël, au Hamas et à d’autres groupes armés palestiniens en sachant que l’État ou le groupe destinataire utilise ces armes pour commettre des actes internationalement illicites », qui comprennent des crimes de droit international tels que les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité - risquent eux-mêmes d’aider et d’assister à ces actes illicites", affirme Patrick Wilcken.

Euronews

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