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La guerre Iran-Israël menace les routes maritimes mondiales

dimanche 6 octobre 2024

Quelles représailles pour le commerce indien ?

Le Corridor économique Inde-Moyen-Orient-Europe (IMEC), officialisé au G20 de 2023, marque une nouvelle ère de coopération internationale. S’étendant sur plus de 4 800 km, il relie l’Inde aux Émirats arabes unis par voie maritime, traverse l’Arabie saoudite, la Jordanie et Israël par voie ferroviaire, et atteint l’Europe. Son infrastructure inclut un « couloir d’hydrogène » reliant Dubaï, Djeddah et Haïfa aux ports européens, ainsi que des câbles pour le transport d’électricité renouvelable.
Il se positionne comme une réponse stratégique à la « Belt and Road Initiative » de la Chine et vise à renforcer les relations entre l’Inde, le Moyen-Orient et l’Europe. Le corridor pourrait également faciliter une normalisation progressive des relations entre Israël et l’Arabie saoudite, tout en apportant des avantages économiques significatifs.

Le conflit en Asie occidentale est entré dans une nouvelle phase d’instabilité, suscitant de vives inquiétudes pour les commerçants du monde entier et de l’Inde, alors qu’une perturbation prolongée du commerce se profile à l’horizon. Le récent tir de missiles de l’Iran sur Israël a intensifié le conflit, faisant craindre que la route maritime vitale de la mer Rouge reste inaccessible aux compagnies maritimes mondiales pendant une période prolongée, ce qui pourrait entraîner des taux de fret excessivement élevés.

L’escalade du conflit, qui dure depuis un an, a été marquée par le changement d’orientation militaire d’Israël, qui est passé du Hamas à Gaza au Hezbollah, le plus puissant des mandataires iraniens, par le biais d’une opération militaire au Liban. Ce changement fait suite à des explosions spectaculaires visant des membres du Hezbollah et à l’assassinat de son chef historique, Hassan Nasrallah.

L’aggravation du conflit a accru le risque de perturbation du commerce, d’autant plus que le Hezbollah entretient des liens étroits avec les rebelles houthis au Yémen, qui sont responsables de la majorité des attaques contre les navires empruntant la route de la mer Rouge. L’Inde, qui dépend fortement du canal de Suez pour ses échanges avec l’Europe, les États-Unis, l’Afrique et l’Asie occidentale, est confrontée à d’importantes conséquences, ces régions représentant plus de 400 milliards de dollars pour l’exercice 23, selon Crisil Ratings.

L’impact sur l’Inde et les bons côtés de la situation

L’impact du conflit se fait déjà sentir, les exportateurs indiens ayant enregistré une baisse de 9 % de leurs exportations en août, principalement en raison d’une réduction de 38 % des exportations de pétrole attribuée à la baisse des marges et à l’augmentation des coûts d’expédition. Un rapport de Crisil a mis en garde contre un impact supplémentaire sur les exportations, en particulier dans le secteur pétrolier, car l’augmentation des coûts de transport est susceptible de réduire les marges globales, ce qui aura un impact sur la rentabilité des raffineurs autonomes.

Toutefois, le commerce de l’Inde avec des acteurs régionaux neutres tels que l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, le Koweït et le Qatar a apporté une lueur d’espoir, les échanges avec ces pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG) ayant augmenté de 17,8 % entre janvier et juillet 2024 par rapport à l’année précédente. Les exportations de l’Inde vers l’Iran ont également augmenté de 15,2 % au cours de la même période.

L’allongement des routes commerciales fait grimper les tarifs de transport maritime

Les perturbations des principales routes maritimes, en particulier le canal de Suez et la mer Rouge, ont entraîné une augmentation de 15 à 20 % des coûts d’expédition, ce qui a gravement affecté les marges bénéficiaires des entreprises indiennes, en particulier celles qui exportent des produits d’ingénierie bas de gamme, des textiles, des vêtements et d’autres produits à forte intensité de main-d’œuvre. Cette situation a entraîné le déclin de certains secteurs, notamment les machines, l’acier, les pierres précieuses et les bijoux, ainsi que les chaussures, malgré une croissance globale des exportations vers l’Union européenne de 6,8 %.

Les entreprises mondiales de transport maritime voient leurs bénéfices augmenter dans le contexte de la crise de la mer Rouge, la société danoise Maersk ayant revu ses prévisions à la hausse en invoquant l’augmentation des taux de fret et la solidité de la demande en matière de transport maritime par conteneurs. Toutefois, un rapport de JP Morgan souligne que plus les perturbations persistent, plus les taux de fret risquent de rester élevés. Néanmoins, il est possible que les taux de fret diminuent une fois les perturbations terminées, étant donné que l’offre de porte-conteneurs reste excédentaire à l’échelle mondiale.

Risques pour le corridor économique Inde-Moyen-Orient-Europe

Le conflit en Asie occidentale pourrait compliquer l’avancement du projet de corridor économique Inde-Moyen-Orient-Europe (IMEC), annoncé lors de la réunion du G20 à New Delhi. Ce plan a été conçu pour créer une route plus rapide reliant l’Inde à la région du Golfe et à l’Europe, réduisant ainsi la dépendance à l’égard du canal de Suez. Toutefois, avec l’éclatement de la guerre en Asie occidentale, le développement de cette route commerciale pourrait se heurter à des difficultés.

Alors que le conflit continue d’évoluer, l’impact sur le commerce mondial et indien reste incertain, avec des inquiétudes sur les perturbations prolongées des routes maritimes cruciales et la possibilité d’une augmentation des taux de fret. Le développement d’itinéraires commerciaux alternatifs et de stratégies visant à atténuer l’impact du conflit sur le commerce sera crucial pour traverser cette période d’incertitude.

Financial Express

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