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France : le cirque des primaires

Léon Camus

mercredi 18 janvier 2017

Que dire de la gauche ? Une procédure qui introduit une sensible amélioration dans la désignation du candidat. Le choix, hier objet de négociation de couloirs, de magouilles, de basses rivalités, relevait de la partitocratie pure, ce qui a donné le résultat que l’on sait avec l’élection du cancre bafouilleur Hollande. Ce n’est pas par amour de la démocratie et de la transparence que ces primaires ont été instituées mais bien parce qu’il était impossible de réitérer un tel cafouillage.

Nous attendrons la semaine prochaine pour porter nos regards par-dessus la ligne bleue de l’Atlantique, vers l’Empire démocratique, ses errements et sa reconstruction attendue, après trois décennies de gouvernance unipolaire, c’est-à-dire peu ou prou hégémonique sur la planète ; ceci avant le retour de la Russie sur la scène géopolitique et le réveil du dragon chinois, la Chine populaire marxiste-léniniste et son un milliard et demi de sujets… En espérant qu’aucun nouvel 11 Septembre ne viendra remettre en cause l’investiture de Donald Trump, car l’État profond veille qui instruit déjà des dossiers d’impeachment.

Les guignols de la politique

Ces primaires, ce n’était pas « mortel combat » mais mortel ennui, pas un mot plus haut que l’autre, seul se démarquait dans les débats, le débraillé peu chic de Benhamias s’essayant à plagier Bourvil : bref du consensus mou, visqueux même.

La courte séance du « bilan » aurait pu être presque hilarante tant nos zigues faisaient de laborieux efforts pour faire semblant de cracher sans cracher dans la soupe. Aucun n’a eu le courage de dire qu’hormis Léonarda (l’élégante moustachue depuis peu titulaire d’un passeport croate dont le retour prochain en Hexagonie est attendu sous peu), la femme Sauvage (celle qui a divorcé de trois balles dans le dos de son mari et récemment graciée par le fait du prince), le mariage pour tous et la sanctification de l’analphabétisme à l’école (voir les dernières dispositions arrêtées par l’affriolante Mme Belkacem [1]), le renforcement de la loi relative à l’avortement de confort intégralement remboursé par l’État alors que la contraception ne l’est pas, et cætera. Des avancées sociétales définitives. Au reste, même avec la meilleure bonne volonté du monde, il faudrait gratter profond pour trouver un peu de positif dans l’interrègne de Poussah Ier.

Le plus cynique de tous dans l’exercice d’autosatisfaction fut certainement à ce propos l’ancien Premier ministre Valls qui n’a évidemment rien à se reprocher.

Étrange aréopage que cette brochette de bobos flanqués de la potiche de service (aux joues rondes il est vrai, à la façon de la Briséis de l’Iliade) ; assez cocasse pour des gens qui hurlent ordinairement à la parité hommes/femmes : une belle illustration de leurs incohérence.

Seules aspérités… l’un est pour le revenu universel, Hamon – l’une des dernières trouvailles avec cette autre coquecigrue, le tirage au sort des sénateurs en attendant mieux – l’autre est contre, Montebourg. À part cela, comme d’habitude, demain l’on rase gratis. Cela fait deux cents ans que l’on ressasse la même antienne et apparemment la grande majorité de nos contemporains continue à se laisser bercer par le chant de sirènes.

Un mot sur le revenu universel… universel en principe seulement

C’est la proposition phare de Benoît Hamon, qui n’a rien trouvé de mieux pour nous enfumer. Maintenant restera à savoir si le bon sens a entièrement déserté l’Hexagonie, car comment ne pas voir que le Revenu pour tous constituera une grande fabrique de fainéants et de travail au noir en sus d’être une pompe aspirante pour le milliard de déshérités extra européens qui campent sous nos murs ? Une idée également défendue par le pitre Bennahmias et portée par les Verts en la personne de Yannick Jadot… mais aussi, on l’oublie un peu vite, par la ci-devant Républicaine d’origine polonaise Kosciusko-Morizet.

C’est paraît-il l’une des idées neuves de la campagne : le revenu universel serait distribué sans distinction d’âge, sans considération d’activités tierces et ne serait pas conditionné à la recherche d’emploi. Le bonheur quoi. Chaque enfant aurait droit à 300 euros quel que soit le revenu des parents. Si on donne 700 euros par personne, cela ne coûterait que 500 petits milliards par an, à peine un quart du PIB.

Maintenant la réalité vraie, nous l’avons entendue sur France Inter dans un dialogue surréaliste le 11 janvier entre l’animateur de “la Matinale”, Patrick Cohen et son homologue, l’économiste Daniel Cohen. Lequel n’est pas n’importe qui puisqu’il est directeur du Département d’économie de l’École normale supérieure.

Celui-ci du même souffle et en une seule phrase nous assène sans frémir : « Je pense qu’il faut donc une mesure universelle pour tous, quelle que soit la situation, mais il faut la cibler pour ceux qui gagnent moins de 2 000 euros ». Donc c’est universel mais « ciblé pour les moins de 2000 € ». C’est une figure de rhétorique ultra classique chez ces gens là, dire une chose pour mieux immédiatement introduire son contraire.

Bref, nous avons ici une « universalité » qui ressemble fort à cette perpétuité à laquelle sont condamnés les pires criminels, une perpétuité qui dépasse rarement les vingt années de réclusion sous forme d’une peine dite incompressible. Ce pourquoi l’on voit régulièrement des assassins présumés repentis, ayant soi-disant payé leur dette à la société, libérés et récidiver aussi sec.

Pas en reste, M. Cohen, formateur de nos élites intellectuelles et bien pensantes, ajoute : « pour les étrangers : c’est la résidence en France et non la nationalité qui déclencherait le système ». La messe est dite. Préparons-nous à « accueillir » un milliard d’allochtones, faux réfugiés ou authentiques crève-la-faim, M. Cohen parle d’or. M. Cohen, en notre nom, leur ouvre grande les portes sur les ondes publiques.

Enfin soyons-en assurés que ces gens ne sont certainement pas mal intentionnés, ni totalement déconnectés du réel. Parce que le réel, ils s’en contrefichent, le réel ne les intéresse pas, seul l’empire des mots compte. « Ils » veulent simplement préparer, pour notre plus grand bonheur, l’assomption de la société de servitude universelle, celle des termites et du Meilleur des mondes d’Huxley. Plus c’est stupide de façon insultante et meilleur c’est… dernière citation de Daniel Cohen : « Le revenu universel va renforcer le pouvoir de négociation des gens sur le marché du travail ».

Ajoutons à ce projet de revenu universel qui commence à être testé en France – ou va l’être tout bientôt – en Gironde dès juin 2017, en Finlande avec un montant assez modeste, l’équivalent de notre RSA soit 560 € - la volonté d’abolir l’héritage grâce à des taxations exorbitantes. Il est vrai que le patrimoine des baby-boomers représente un pactole faisant saliver tous les prébendiers qui se gavent aux sommets de l’État.

Un programme non-dit de spoliation générale

Précisons que cette ouverture au « droit à la paresse » va créer une clientèle électorale parfaitement fidélisée, car qui ira voter contre les équipes politiques qui lui assurent sa subsistance mensuelle ? Personne évidemment ne répond à la question de savoir qui alimentera les caisses publiques si le plus grand nombre préfère vivre des subsides de l’État providentiel ? Une dépendance à l’égard des deniers publics (l’État restant maître de fermer le robinet à sa convenance) qui ressemble bigrement à de la servitude. Mais une servitude sacrément tentante à une époque où il faut avoir la foi chevillée au corps pour trouver un emploi ne serait-ce qu’alimentaire.

Quant à nos candidats, ceux-ci passent sous silence cet aspect moins alléchant de leur programme, en réalité un non-dit délibéré : la disparition de l’héritage parce qu’injuste, c’est-à-dire foncièrement (!) contre l’égalité des chances. Mais chut ! Motus et bouche cousue, le temps de la campagne, nul n’évoquera en cette période fiévreuse et décisive qu’en réquisitionnant les héritages, l’État se réserverait le droit d’en redistribuer les montants. Cela rappelle les milliards des Congrégations, supposés renflouer les finances, volés à l’Église catholique en 1905 lors de la Séparation des Églises et de l’État.

Reste que ces économistes super diplômés, mais aussi fieffés coquins autant qu’idéologues messianistes, ne se demandent pas qui achètera les biens immobiliers confisqués, ni quel sera à ce moment-là l’état du marché. Ces gens sont trop intelligents pour se poser des questions aussi triviales.

Pour la Gauche qui avance masquée et progresse pas à pas dans les esprits et dans les dispositifs institutionnels (car ce que fait de pire la Gauche, le Droite ne le défait jamais, au contraire elle surenchérit), il s’agirait d’un dispositif venant s’ajouter aux autres en vue de « réparer » les inégalités. Ah le joli mot, Réparer. Le mot n’est pas choisi par hasard, la « réparation du monde », tikkoun, étant un concept central de la cabale si chère à Vincent Peillon et revendiquée par icelui.

Libéraliser/dépénaliser le cannabis

Abordé au cours du second débat tout aussi morne que le premier, vient s’ajouter la question cruciale dans un pays en pleine récession, de la libéralisation et de la dépénalisation de la consommation du cannabis, ceci sous, bien entendu, couvert de Santé publique (la santé à bon dos !). Personne ne dit s’il sera licite de fumer au volant sachant que ce psychotrope modifie la perception de l’espace et particulièrement du temps et des distances.

Pour ceux qui l’ignoreraient, le chanvre indien fabrique en silence et en série des névropathes qui finiront par saturer nos établissements psychiatriques. Qu’importe, il reçoit en attendant les bénédictions de nos élites pour ses multiples vertus, élites désinhibées, fluides selon l’expression à la mode, elles-mêmes affranchies de tout sens et restrictions morales.

Seul l’ancien Premier ministre Emmanuel Valls s’y oppose, les autres se contentant d’exprimer des opinions assez cafouilleuses assorties d’une extensive méconnaissance du dossier. À ce propos Valls tranche indéniablement avec ses collègues ou contraste avec le reste de la brochette à tel point que l’on en vient à se demander si ces « primaires » ne sont pas une banale comédie, une mise en scène destinée à le mettre en valeur pour le faire désigner comme candidat unique, sauveur d’une Gauche rassemblée derrière le petit coq des Asturies. En fait, de tous il est le plus sectaire, le plus cynique, le plus dangereux parce que le plus sauvagement déterminé. Son but : éliminer Macron le gominé… à moins qu’ils ne finissent par faire cause commune et s’apparier ensemble.

Macronnade

Très inquiétant le choix d’Emmanuel Macron de s’exprimer en anglais à Berlin le 10 janvier à l’occasion d’une cérémonie d’hommage aux victimes de l’attentat du 19 décembre sur la Breitscheidplatz. Mais chez ce personnage, le recours à l’anglais est assurément plus un acte manqué qu’une véritable faute. Il a dû croire que cela passerait dans l’épaisseur du trait… Selon lui « l’usage de l’anglais transcenderait les nations et rendrait un jour possible une citoyenneté globale ». Discours en anglais destiné aux dires de certains, à ringardiser la majorité de la classe politique française ? Drôle d’homme providentiel, se voulant le seul représentant de gauche capable de vaincre la droite dure du mol Fillon et le Front dit national lors de la prochaine présidentielle. Macron se voudrait incarner la gauche moderne, européenne, mondialisée, affranchie des traditions politiques françaises : les bobos sans-frontièristes, internationalistes et postnationaux, l’adulent.

Précisons enfin que le niveau moyen, intellectuel et culturel de la bande, n’est guère brillant, hormis Peillon qui paraît vaguement s’ennuyer et être en service commandé. Sous cet angle, malgré son évidente absence de charisme, l’homme qui a déclaré qu’on « ne pourra jamais construire un pays de Liberté avec la religion catholique », mais qui n’est pas gêné pour déclarer que la laïcité est au sens fort « une religion qui puise sa source dans l’illuminisme et la cabale », apparaît comme le phénix des hôtes de ces tréteaux.

Bref ces gens, ces prétendus candidats à la magistrature suprême nous promettent de façon éhontée la Liberté et le bien-vivre alors qu’au fil des ans, l’État tentaculaire se fait de plus asphyxiant, au plan moral comme au plan matériel et existentiel. La caporalisation bureaucratique de la société a dépassé depuis longtemps les limites du supportable (la vignette jaune, la rouelle à 4 € pour circuler dans Paris, en est un exemple).

Un seul objectif : « battre l’extrême droite, Fillon et la fasciste Le Pen »

Tous cependant, ces grands tolérants, se trouvent d’accord sur un seul et unique objectif : « battre l’extrême droite, Fillon et la fasciste Le Pen ». En cela tient l’essentiel de leur programme, sans que l’on sache très bien en quoi leurs rivaux seraient une telle menace pour des libertés qui de toutes les façons fondent comme neige au soleil.

Mais brandir un épouvantail de nuées, évoquer une indicible horreur, a toujours constitué le meilleur moyen de rabattre le troupeau vers les mauvais bergers. Ces cyniques travaillent par suggestion, dans le vague, le flou, l’indicible, le tournoyant miroir aux alouettes… quoiqu’eux-mêmes soient ineffables ! Parce qu’enfin le bon peuple n’aime que ce qu’il aime entendre de la part des politiques : la promesse de lendemains qui chantent, sans effort et en se laissant bercer et fasciner par la danse du ventre de serpents tentateurs jouant allégrement de la flûte de Hamelin.

En résumé, ces gens nous donnent le spectacle de la démocratie, du spectacle et rien d’autre. Maintenant il faudrait voir l’envers véritable du décor : 2100 milliards de dettes, rien que 160 milliards de déficit pour la sécurité sociale. Alors comment peuvent-ils se présenter devant leurs concitoyens dans un tel contexte, avec un tel bilan, face à une pareille débâcle ?

Croissance zéro, fuite des industries, augmentation constante du nombre de chômeurs, croissance exponentielle de la dette, invasion massive de migrants de pays non en guerre, insécurité partout, un terrorisme qui frappe à l’aveugle et a causé quelque 200 morts en un an, comment peuvent-ils répétons-le avoir l’indécence et l’outrecuidance de se présenter aux suffrages des électeurs ?

Qui sont-ils d’ailleurs ?

Des politiciens professionnels qui n’ont jamais de leur vie dirigé une entreprise et ont fait carrière dans un monde virtuel, une dimension parallèle. Ce sont littéralement des aliens, des parasites de la vie réelle. Plus grave : personne ne leur demande d’ailleurs d’apporter de vraies réponses aux vrais défis que doit surmonter notre société à l’heure présente. Surtout pas les journalistes qui ne leur posent que des questions vidées de tout contenu, des gens de presse qui sont d’abord des complices et des acolytes choisis pour leur servir la soupe.

À l’instar d’Elizabeth Martichoux, ex épouse d’un conseiller véreux, le gandin Aquilino Morelle, conseiller de M. Hollande après avoir été celui du Premier ministre Jospin. Celui qui faisait rémunérer son cireur de godasses personnel sur les fonds élyséens. Ce qui le conduit à présent à débiner son ancien patron par témoignage littéraire interposé. Dans son émission « État de santé » diffusée le 26 mai 2014 sur la chaîne LCP, la ci-devant journaliste n’avait pas hésité à se contredire et à fournir quelques contre vérités bien senties à propos du droit à l’avortement à quelques minutes d’intervalle, cela au plus grand mépris des téléspectateurs.

Un président normal vraiment démocratique

Pour ne pas conclure, affirmons qu’Hollande aura été de toute l’histoire de la République le premier président vraiment démocratique… Car en le regardant exercer sa fonction, n’importe quel abruti de base aura été libre de penser qu’il pouvait en faire tout autant. Le premier boutiquier venu aurait pu, avec un minimum de pratique, ânonner les mêmes discours, bredouiller sur le front des troupes ou serrer la paluche des ses homologues, en encore taper la bise à Frau Merkel.

Un peu comme lorsque le populo se trouve devant un barbouillage d’art contemporain qu’il ne peut qu’apprécier puisqu’il n’y rien à comprendre ni à voir. Ces expressions graphiques et autres installations ne créent en effet pas de complexe, pas de distance hiérarchique entre l’artiste et l’admirateur. Celui-ci n’est pas confronté à un talent inaccessible fruit d’un long labeur et d’un don inné, et que par conséquent le chaland n’est pas confronté à un artefact traumatisant, fasciste en un mot, parce qu’au fond n’importe – oui qui n’importe qui peut prétendre posséder une absence de génie équivalente. Merci M. Hollande pour cette grande leçon d’humilité démocratique… !

À peine arrivée aux Affaires, le 10 mai 1981, nos bons socialos vidaient les caisses et la cagnotte qu’avait constituée Raymond Barre, cet homme carré dans un corps rond. Par la suite, pendant trente cinq ans ils (gôche et drouate réunies) n’ont eu aucun mal à nous démontrer leur incapacité chronique… et le mal s’est aggravé avec le temps. Pourtant ils espèrent remettre le couvert. Peut-être ont-ils raison sachant que les Françaises et les Français sont demeurés de doux rêveurs manquant cruellement de lucidité politique, même placés devant l’évidence... Le problème est que nos concitoyens se croient informés parce qu’ils regardent chaque soir la téloche : or il n’y a pas de pires et de plus dangereux ignorants que ceux qui croient savoir.

15 janvier 2017

Notes

[1Exemple de la folie ravageuse qui souffle sur la bureaucratie céleste du ministère de l’Éducation nationale : l’introduction de la notion de prédicat dans les programmes de français, soit l’agrégation du verbe et du COD dans une seule entité, une « avancée » qui commence à faire du bruit. Cette notion était passée à peu près inaperçue. Avant nous avions un sujet, un verbe, un complément d’objet ; maintenant verbe et complément d’objet sont confondu : la méthode globale en quelque sorte appliquée à la grammaire ; le français devient une langue agglutinante. Fini la distinction du sujet et du monde. Le monde n’est plus qu’une prédication du sujet, retour à l’animisme conceptuel. Personnalisation qui met fin à la distanciation dans l’échange : on ne pourra plus dire nothing personnal. Commentaire d’un internaute : « La grammaire structure la langue française, je pense que la consigne est désormais de fabriquer des abrutis à la chaîne ». Rappelons qu’un préadolescent sur trois arrive en Sixième incapable de lire. Au début des Années cinquante pour entrer au lycée, il fallait réussir à un examen comportant une dictée : 5 fautes étaient alors éliminatoires.

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