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Ces agences d’Etat inutiles et aux missions obscures

lundi 11 mars 2019

Manuel Valls a promis de réduire les coûts de fonctionnement des agences de l’État qui représentent chaque année 50 milliards d’euros. Voici l’inventaire de ces comités fantômes auxquels le gouvernement pourrait s’attaquer.

Les agences de l’Etat sont dans le collimateur du gouvernement. Afin de réduire de 18 milliards d’euros les dépenses de l’Etat d’ici 2017, le premier ministre s’est engagé à réduire le coût de fonctionnement de cette kyrielle de comités dont l’efficacité est souvent remise en question. Pour ce faire, Bercy - qui n’a toujours pas préciser sa feuille de route - pourra s’appuyer sur plusieurs rapports qui ont déjà suggéré des pistes d’économies pour réduire le train de vie de ces commissions. Mais il ne suffira pas de réduire les effectifs, baisser les salaires ou modifier leur mode de financement pour alléger les dépenses de ces comités, qui s’élèvent à 50 milliards d’euros par an. Comme le préconisait un rapport alarmant de l’inspection générale des finances en 2012, le gouvernement devra aussi faire le ménage parmi les 1244 agences de l’Etat* et s’attaquer à ces comités inutiles, fantômes, dont les missions restent parfois énigmatiques. En voici quelques exemples.

Ces agences aux missions obscures

Un certain nombre d’agences présentent des missions aux contours très flous. L’inspection générale des Finances avait notamment pris pour exemple l’Agence de développement de la culture Kanak et l’Agence bibliographique de l’enseignement supérieur. Mais la liste est beaucoup plus longue. Que fait exactement le Centre technique du livre de l’enseignement supérieur (CTLES) ? Et le Service Culture, éditions, ressources pour l’Éducation nationale (SCEREN) ? Les missions qui incombent à l’opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la culture restent également très opaques.

Ces comités fantômes

À en croire une annexe du Projet de loi de finances 2014, certains comités, placés directement sous la houlette du gouvernement, siègent rarement, pour ne pas dire jamais. C’est notamment le cas du Comité national des secteurs d’activités d’importance vitale, qui est composé de 26 membres et qui n’avait aucune réunion à son agenda en 2012. Idem pour le Comité stratégique de la sécurité des systèmes d’information dont les coûts de fonctionnement s’élèvent à 24.600 euros en 2012. « Mais ces comités sont composés de fonctionnaires et dépensent peu d’argent », nuance René Dosière, député apparenté PS et spécialiste de la gestion des dépenses publiques.

Ces agences jugées « inutiles »

C’est ainsi que la Cour de comptes avait qualifié l’agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) dans son rapport annuel en 2009. La juridiction financière avait alors écrit qu’il s’agissait d’« une agence de financement aux ambitions limitées, privée de ses moyens » et qu’elle était « désormais inutile ». En conclusion, elle recommandait sa suppression en intégrant ses activités à la DGITM (La direction générale des Infrastructures des Transports et de la Mer). Toujours en exercice, cette agence a voté son budget 2014 en février 2014. Comme les années précédentes, l’AFITF prévoit de dépenser 1,8 milliard d’euros sur l’année et affiche une dette de 108 millions d’euros.

Ces agences à la gestion douteuse

La Sovafim est sûrement l’un des meilleurs exemples d’agences dont la gestion soulève de nombreuses questions. Chargé de vendre des terrains et des bâtiments de Réseaux ferrés de France depuis sa création en 2006, l’établissement a écoulé l’intégralité des 158 biens qui lui avaient été confiés. Pour compenser la baisse de ses revenus, la société a donc cherché à diversifier ses activités en louant des biens immobiliers ou en investissant dans la production d’énergie solaire ! Or, « cette mutation, nullement prévue lors de sa création, a été opérée dans un cadre juridique dépourvu de stabilité et de clarté », signale la Cour des comptes dans son dernier rapport. La juridiction financière relève également un équilibre économique « incertain » et rappelle que la Sovafim n’a pas reversé un seul centime à Bercy depuis 2008. Sa suppression permettrait de récupérer une trésorerie nette de 65 millions d’euros. Dans son dernier rapport, elle a jugé cette société publique inutile et susceptible de faire courir des risques financiers à l’Etat.

L’inspection générale des Finances avait également pointé du doigt l’étrange fonctionnement de la Bibliothèque publique d’information du centre d’art contemporain Beaubourg, qui possède sa propre gestion et son propre financement, au lieu d’être tout simplement reliée au musée.

Le jeu des doublons

Le secteur de la santé est le parfait exemple des doublons entre agences. L’Anap (Agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux), la HAS (Haute autorité de santé) et l’Anesm (Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux) ont toutes les trois la même mission, faire des recommandations, mais rien ne semble les différencier vraiment les unes des autres. L’Inspection générale des finances avait d’ailleurs dénoncé une dispersion des efforts et un manque de lisibilité institutionnelle.

Même constat dans le secteur de la formation où se côtoient le Conseil national de la formation de tout au long de la vie (CNFPTLV), le Conseil national de l’insertion par l’activité économique (CNIAE), le Centre pour le développement de l’information sur la formation permanente (Centre Inffo), l’Association pour la formation professionnelles des adultes (Afpa), l’Institut national du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle et bien d’autres encore.

Entre 2008 et 2012, l’ancien gouverment n’a supprimé que 19 agences et en a regroupé près de 136. Une goutte d’eau au regard des 1244 entitées dénombrées par l’Inspection générale des finances. Au total, l’Etat pourrait économiser près de 2 milliards d’euros en s’attaquant efficacement à cette nébuleuse de comités.

*Une agence de l’Etat est une entité publique chargée de la réalisation d’une mission d’intérêt général. Il existe une multitude de statuts juridiques : les établissements publics administratifs (Epa), les établissements publics industriels et commerciaux (Epic), les autorités administratives indépendantes, les groupements d’intérêt public, associations.

Figaro Caroline Piquet

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