Vote par correspondance des personnes détenues : les maires devront veiller à modifier les listes d’émargement
Voici un décret d’application qui, pour une fois, a été pris avec une remarquable célérité : c’est le jour même de la promulgation de loi de programmation et de réforme de la justice, le 29 mars, qu’un décret d’application d’un de ses articles est paru dans le même Journal officiel ! Il s’agit de l’application de l’article 87, qui traite du vote par correspondance aux élections européennes des personnes détenues. Ce matin, une circulaire a été publiée pour expliquer, en détail, le nouveau dispositif.
Il s’agit de permettre aux personnes détenues et n’étant pas frappées d’une incapacité électorale de faire valoir un « droit d’option » pour voter par correspondance, sous pli fermé, plutôt que par procuration ou en se voyant accorder un droit de sortie. La raison pour laquelle le décret a été pris si rapidement est que les détenus n’ont que jusqu’au 4 avril pour faire leur choix – date au-delà de laquelle celui-ci ne sera plus recevable. Ce choix est irrévocable, et les détenus qui le font sont informés qu’ils ne pourront plus voter dans leur commune, ni par correspondance ni à l’urne.
C’est en cela que cette disposition concerne les maires, qui vont devoir mentionner sur la liste électorale de leur commune que les personnes concernées ne peuvent pas y voter.
Modification de la liste d’émargement
Cette procédure est grandement facilitée par l’existence du nouveau répertoire électoral unique, géré centralement par l’Insee. Voici quelle est la procédure.
Les détenus concernés ont reçu l’information qu’ils peuvent demander le vote par correspondance, et il leur a été remis un formulaire spécifique. Une fois rempli, le formulaire est remis (avant le 4 avril) « en mains propres » au chef d’établissement qui, une fois vérifiée l’identité du détenu, transmet le document à une commission électorale spéciale composée de magistrats et de représentants des ministères de la Justice et de l’Intérieur. Cette commission envoie le formulaire à l’Insee, « au plus tard le 12 avril 2019 à midi ». L’Insee vérifiera alors que la personne est inscrite sur une liste électorale, et retransmettra l’information à la commission au plus tard le 29 avril. La commission arrêtera alors la liste des personnes admises à voter par correspondance, le 30 avril, et la retransmettra à l’Insee.
C’est ce dernier qui se chargera alors de communiquer les informations aux maires, « sans délai », par l’intermédiaire du système de gestion du répertoire électoral unique. « Le maire (…) porte à l’encre rouge au droit du nom de l’électeur concerné sur la liste d’émargement la mention ‘’ne vote pas dans la commune’’ », précise le décret. Si la liste d’émargement est informatisée, il est possible d’inscrire la mention en noir, mais « sous réserve que les caractères utilisés se distinguent avec netteté de ceux qui sont utilisés pour l’édition des autres indications figurant sur la liste ».
Il s’agit évidemment d’empêcher toute possibilité de double vote.
Une liste électorale spéciale des personnes concernées est donc constituée, et les enveloppes de vote par correspondance seront adressés centralement à la commission spéciale, au ministère de la Justice, qui se chargera des contrôles et du dépouillement.
Les autres possibilités
Ces dispositions ne remettent pas en cause les autres options qui sont ouvertes aux détenus, si ceux-ci les choisissent : le vote par procuration (effectué par un mandataire « inscrit dans la même commune que le mandant ») ou le vote à l’urne, dans sa commune, en cas de droit de sortie – accordé pour le jour du scrutin aux personnes purgeant une peine de moins de 5 ans ou une peine de plus de 5 ans dont ils ont déjà effectué la moitié.
Concernant les procurations, la circulaire publiée ce matin rappelle qu’il peut être difficile à des personnes détenues parfois à l’autre bout du pays de trouver un mandataire dans leur commune de rattachement. Les établissements pénitentiaires sont encouragés à prendre contact avec les maires concernés afin que ceux-ci, « en faisant appel à l’esprit civique de ses administrés », puissent proposer le nombre de mandataires nécessaires. Ce qui n’est pas si simple – pour ne pas dire plus – puisque ceux-ci devront rencontrer le détenu « dans l’établissement », afin d’établir le lien de confiance « nécessaire à l’établissement d’une procuration ».
Les procurations sont ensuite les mêmes que pour tous les autres cas : elles font l’objet d’un formulaire Cerfa qui doit être adressé au maire de la commune de rattachement.
AMF