C’est via les tests prénataux non invasifs vendus par la société BGI Group que la Chine aurait récupéré les données génétiques de millions de femmes à travers le monde, ce qui inquiète fortement les États-Unis.
Les données ADN collectées à partir de tests prénataux sur des femmes en dehors de la Chine seraient stockées pendant cinq ans dans la base de données génétiques financée par le gouvernement chinois. Photo d’illustration Pixabay
Les données ADN collectées à partir de tests prénataux sur des femmes en dehors de la Chine seraient stockées pendant cinq ans dans la base de données génétiques financée par le gouvernement chinois.
BGI Group, une société chinoise de gènes qui vend des tests prénataux non invasifs* (NIPT) développés en collaboration avec l’armée chinoise dans 52 pays (dont l’Allemagne, l’Espagne, le Danemark, la Grande-Bretagne, le Canada), a collecté des données génétiques auprès de millions de femmes pour des recherches approfondies sur les caractéristiques des populations, a révélé Reuters. Ces données, analysées avec l’intelligence artificielle, pourraient donner à l’avenir un avantage économique et militaire de taille à la Chine, ce qui inquiète fortement les États-Unis.
Vers des soldats génétiquement améliorés ?
En effet, les instructions informatiques que BGI utilise pour traiter les données NIFTY montrent qu’il collecte un large éventail d’informations sur les clients en plus de leur code génétique. Cela inclut le pays de la femme, les antécédents médicaux et le sexe du fœtus, selon les instructions examinées par Reuters sur un forum de programmeurs en ligne.
Alors que la science met en évidence de nouveaux liens entre les gènes et les traits humains, cet accès à tous ces génomes humains pourrait permettre à la Chine de dominer le marché des produits pharmaceutiques mondiaux et potentiellement conduire à des soldats génétiquement améliorés, ont averti des conseillers gouvernementaux américains en mars dernier.
Quel consentement ?
De son côté, BGI assure ne pas avoir d’accès, à aucun stade du processus de test ou de recherche, à des données personnelles identifiables ou à la capacité de faire correspondre ces données avec des dossiers personnels. Le consentement signé est obtenu à l’avance, a déclaré BGI, et ses protocoles de confidentialité des données répondent à des normes internationales strictes.
Les données ADN collectées à partir de tests prénataux sur des femmes en dehors de la Chine sont stockées pendant cinq ans dans la base de données génétique financée par le gouvernement chinois, l’une des plus importantes au monde. BGI, dans laquelle le gouvernement de la ville de Shenzhen et l’État de Pékin ont pris des participations en 2014, gère cette banque de gènes.
Des données qui peuvent être partagées pour « la sécurité nationale »
Reuters n’a trouvé aucune preuve que BGI ait violé les accords ou les règlements sur la confidentialité des patients. Cependant, la politique de confidentialité sur le site Web du test NIFTY indique que les données collectées peuvent être partagées lorsqu’elles sont « directement pertinentes pour la sécurité nationale ou la sécurité de la défense nationale » en Chine, précisent nos confrères.
En 2019, Pékin a indiqué que les données génétiques peuvent être une question de sécurité nationale et, depuis 2015, la Chine a interdit aux chercheurs étrangers d’accéder aux données génétiques sur le peuple chinois.
Et si BGI assure ne pas conserver les données des femmes de l’étranger au-delà de cinq ans, le centre national de contre-espionnage et de sécurité américain met en garde : « Les kits de tests prénatals non invasifs commercialisés par les entreprises de biotechnologie chinoises remplissent une fonction médicale importante, mais ils peuvent également fournir un autre mécanisme à la République populaire de Chine et aux entreprises de biotechnologie chinoises pour collecter des données génétiques et génomiques du monde entier. »
* Effectué par simple prélèvement sanguin chez la femme enceinte, le dépistage prénatal non invasif (DPNI), ou test génétique de l’ADN fœtal circulant dans le sang maternel permet notamment de dépister le risque fœtal de trisomie 21 au cours de la grossesse.