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Réforme de la fonction publique et le tabou du licenciement des fonctionnaires

mercredi 17 avril 2024

Stanislas Guerini, ministre de la Transformation et de la Fonction publiques pointe du doigt les insuffisances des fonctionnaires et lève le tabou du licenciement.
Ce projet s’inscrit dans la numérisation de l’administration française et du tout numérique piloté par le cabinet conseil McKinsey à l’origine du programme présidentiel de Macron de 2017.
Le projet de loi pour « l’efficacité de la fonction publique », sera présenté en Conseil des ministres à la rentrée de septembre.

La fonction publique n’est plus attractive auprès des jeunes et reste pourtant le premier employeur de France avec près de 6 millions de fonctionnaires.
Dans le cadre de CAP 2022 (« Comité action publique 2022 »), le rapport Service Public a été dévoilé. Son contenu est un programme libéral appliqué aux services publics. Il est dominé par un seul et unique mot d’ordre : réduire par tous les moyens ! Il faut réduire le coût financier, réduire le nombre de fonctionnaires, réduire le service rendu, réduire le déploiement territorial au risque de réduire la continuité et l’égalité républicaines.

Cette méthode qui pousse à faire accepter le licenciement des agents de l’Etat est une philosophie appliquée au pouvoir fédéral américain à savoir le New Public management.
Si l’Etat voulait sous traiter ses services pour économiser, cette doctrine de la rentabilité a été remplacé par l’hyper présence de l’Etat.

L’interventionnisme de l’exécutif va changer la donne pour maquiller les anciennes techniques de rentabilité pour les accentuer et virer les agents de la fonction publique qui ne sont pas adaptés au numérique. Ces vieux agents qui étaient des « gratte papier » ne sont pas inclus dans le virage numérique où l’IA va remplacer nos fonctionnaires comme pour les cartes grises.

Devant la Commission des lois de l’Assemblée nationale, le ministre de la Fonction publique, Stanislas Guerini, a lancé les premières pistes de son futur projet de loi sur la fonction publique
« Il faut pouvoir rentrer plus facilement dans la fonction publique, bouger plus facilement dans la fonction publique et parfois pouvoir sortir plus rapidement de la fonction publique ».

Si les barons de l’Etat sont des champions du pantouflage avec des aller et retours entre le secteur public et privé, la nouvelle mobilité sera d’expulser ceux qui ne veulent pas de changement au sein de leur carrière.
Le concours sera obsolète pour les apprentis fonctionnaires méritant avec comme fonction de récompenser ceux qui seront obéissant alors que la promotion de carrière était suspendue au succès des concours. « Aujourd’hui, je ne sais plus expliquer à un maire pourquoi il ne peut pas promouvoir un agent méritant dès lors qu’il n’a pas recruté trois agents à l’extérieur », « Il nous faut aussi pouvoir mieux valoriser les années passées à l’extérieur de la fonction publique ».

« Ce n’est pas parce qu’il est nécessaire d’humaniser le service public qu’il faut tourner le dos au numérique. Ce serait une impasse, car aujourd’hui, plus de 90% des interactions entre les Français et leur administration ont lieu via le numérique : mails et plateformes sur un téléphone ou un ordinateur portable ». Stanislas Guerini
« Nous devons réfléchir aux conditions d’accès à la fonction publique, aux concours et à la professionnalisation d’un certain nombre d’entre eux ainsi qu’au recrutement sur titre ».

Ce que Stanislas Guerini ne nous dit pas c’est que la loi numérique est une disparition programmée du Service Public.
Bruxelles a préconisé la mise à la page numérique de la France : tous nos territoires doivent avoir une couverture internet afin d’être égalitairement reliés au cyberespace.
Le projet de déconstruction de l’Etat avait commencé sous Balladur avec sa réforme des collectivités territoriales, laquelle transférait le pouvoir de décision des élus locaux - rompant en cela le principe de subsidiarité - à des fonctionnaires non élus et éloignés du terrain. Puis sous l’ère de Hollande, Macron et Valls ont inlassablement dérèglementé le Service Public.

Qu’est-ce qu’une Maison de Services au public ?
Ou comment l’Etat se désengage de ses missions...
On lit sur le site des Maisons de Services au public qu’elles offrent « Une gamme élargie de services en un lieu unique ». Ainsi « l’usager est accueilli [...] dans un lieu unique » et peut « effectuer des démarches administratives relevant de plusieurs administrations ou organismes publics ». Tout cela de façon numérique.
C’est le Commissariat Général à l’Egalité des Territoires qui « pilote la politique publique d’accessibilité aux services, dont les Maisons de services au public sont un outil de proximité ».

Depuis 2016, 420 Maisons de services au public maillent le territoire.
« L’animation territoriale est assurée selon les cas par des collectivités, des associations ou des préfectures à l’échelle locale, départementale, régionale ou nationale. »
« Une Maison de services au public est généralement portée par une collectivité locale (commune, communauté de communes,..). Le portage associatif est également possible. Une association peut contractualiser avec la collectivité territoriale qui soutient la demande de labellisation auprès du Préfet ».

Pour forcer cette transformation de la fonction publique Stanislas Guérini estime qu’il faut « considérer qu’au nom de la garantie de l’emploi, on ne puisse pas se séparer d’un agent qui ne ferait pas son boulot ».
« Quand on supprime un service administratif, les agents publics, on leur confie une autre mission. Pour ainsi dire, il n’y a pas de licenciement économique dans la fonction publique et je ne souhaite pas changer ça, je pense que statutairement c’est quelque chose de très important, qui distingue le public du privé ».
« Mais le statut n’a jamais expliqué, pas même en 1946 quand il a été instauré, qu’on ne pouvait pas licencier quelqu’un qui ne fait pas bien son travail. Cet outil-là est très mal défini et surtout extrêmement peu appliqué : il y a dans l’Etat 2,5 millions d’agents publics. L’année dernière, il y a eu 13 licenciements pour insuffisance professionnelle ».
Stanislas Guerini occulte que les économies se feront aussi par la diminution des agents de la fonction publique puisqu’il n’y a plus d’argent dans les caisses pour payer le personnel de l’Etat.
La dette de l’Etat au hors bilan bancaire des engagements de paiement représente plus de la moitié du PIB français.

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