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L’Insee ajoutera le trafic de drogue dans la richesse nationale, mais pas toute la prostitution

samedi 9 mai 2015

Eurostat demande aux États membres de l’Union européenne d’intégrer certaines activités illégales dans les statistiques nationales. L’Insee a annoncé qu’elle prendra désormais en compte le trafic de drogue dans le calcul du revenu national brut, différent du PIB. Seule la prostitution « discrète » continuera en revanche d’être comptabilisée.

L’Insee ne suivra qu’en partie les règles européennes. L’Institut européen de la statistique, Eurostat, avait demandé l’an dernier aux États membres de l’UE d’intégrer les activités illégales créatrices de richesses (trafic de drogue et prostitution) dans les statistiques nationales, estimant qu’il s’agissait de transactions commerciales menées d’un commun accord. Mais en France, l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) a décidé de prendre en compte le trafic de drogue seulement pour déterminer le revenu national brut (RNB, qui sert à établir la contribution de la France au budget de l’Union européenne) et de ne pas revoir son mode de calcul au sujet de la prostitution.

La drogue dans le RNB, mais pas dans le PIB

Le directeur des études et synthèses économiques à l’Insee, Éric Dubois, a déclaré mardi :

« Nous intègrerons (le trafic de drogue) pour les besoins de la politique européenne, notamment pour l’établissement du Revenu national brut en septembre prochain. »

En revanche, l’Insee ne comptabilisera pas la drogue dans le produit intérieur brut (PIB), mesure comptable qui fait référence dans le débat public.

« Dans le trafic de drogue, ce qu’on a longtemps défendu est l’argument selon lequel il y a une dépendance et donc la personne qui se drogue ne consent pas librement à l’échange », a rappelé Éric Dubois.

Une distinction entre prostitution « discrète » et « de rue »

Quant à la prostitution une partie est déjà prise en compte dans le PIB. Éric Dubois a souligné :

« Tout ce qui est de la prostitution discrète, c’est-à-dire de la prostitution qui se cache derrière d’autres activités, on considère qu’on le prend déjà en compte » de même que la fraude fiscale et le travail au noir, qui représentent « autour de 4 points de PIB ».

Il a toutefois précisé :

« Il y a aussi une prostitution de rue qui est plutôt le fait de réseaux de mafieux et relève plutôt de la traite de personnes en situation irrégulière etc. Pour le coup, le critère de consentement mutuel n’est probablement pas vérifié », ce qui conduit l’Insee à ne pas l’intégrer dans ses mesures.

La ministre française des Droits des femmes, Najat Vallaud-Belkacem, et la ministre belge de l’Intérieur Joëlle Milquet, avaient d’ailleurs déjà insisté sur ce point dans un courrier adressé à la Commission européenne :

« La prostitution n’est pas une activité commerciale librement consentie. Croire qu’elle puisse l’être est un parti pris idéologique, c’est un mirage et une offense aux millions de victimes de l’exploitation sexuelle à travers le monde », estimaient-elles.

D’autres États se sont déjà conformés

Les États ont jusqu’en septembre pour se conformer à la demande d’Eurostat.

L’Italie a déjà annoncé le 22 mai qu’elle intégrerait dans le PIB l’argent de la drogue, de la prostitution ainsi que de la contrebande de tabac et d’alcool. En 2012, la Banque d’Italie avait évalué la valeur de ce qu’elle appelait « l’économie criminelle » à 10,9% du PIB.

Le Royaume-Uni a lui estimé que les revenus générés par le trafic de drogue et la prostitution pourraient augmenter le PIB nominal de 12,3 milliards d’euros, un peu moins de 1%.

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