Les parlementaires ont définitivement adopté, jeudi 23 juillet, le troisième projet de loi de finances (PLFR 3) pour 2020 qui doit permettre de faire face, en urgence, à la crise sanitaire et économique qui touche le pays, en attendant la présentation, fin août, d’un plan de relance de 100 milliards d’euros. L’Assemblée nationale a ainsi donné son feu vert à ce dernier budget de crise, après que le Sénat a donné son aval un peu plus tôt dans la journée.
1,75 milliard d’euros pour le bloc communal
Le texte final, issu d’un compromis entre sénateurs et députés en commission mixte paritaire (lire Maire info du 22 juillet), prévoit environ 45 milliards d’euros supplémentaires pour secourir les secteurs les plus fragilisés par la crise (tourisme, aéronautique, automobile, emploi des jeunes...) et intègre 4,5 milliards d’euros de soutien aux collectivités qui ont été « durement sollicitées par la crise », dont 1,75 milliard d’euros pour les seules communes et intercommunalités. « Cet accord permettra de déployer plus vite les aides aux entreprises, aux ménages modestes et aux collectivités territoriales et de préparer la relance », a rappelé le rapporteur général à l’Assemblée, Laurent Saint-Martin.
Le ministre délégué chargé des Comptes publics, Olivier Dussopt, s’est félicité d’apporter « un soutien significatif aux collectivités locales », tandis que le rapporteur général du budget au Sénat, Albéric de Montgolfier (LR), a regretté « l’absence » dans ce texte « de mesures de relance », celles-ci devant intégrer le projet de loi de finances (PLF) pour 2021, « car les ménages et les entreprises ont besoin de visibilité dès maintenant ».
La députée socialiste d’Ille-et-Vilaine, Claudia Rouaux, a, de son côté, critiqué des mesures de soutien « insuffisantes » envers les collectivités, et notamment le fait que « les communes et les EPCI ne bénéficieront d’aucune compensation de l’État pour leurs pertes de recettes tarifaires ». « Plutôt que de diminuer les impôts de production de 20 milliards d’euros et de réduire une nouvelle fois les recettes des collectivités, aidez-les à être en mesure d’investir », a-t-elle lancé.
Michel Castellani, député de Haute-Corse (Libertés et territoires), a, quant à lui, souligné que les propositions du gouvernement ne répondaient que « partiellement » à la crise puisque « les pertes pour les collectivités territoriales sont estimées à 7,5 milliards d’euros ».
Garantie de ressources en 2020
L’une des mesures phares de ce budget de crise, concernant les collectivités, est la mise en place d’une nouvelle dotation visant à soutenir les collectivités du bloc communal (ainsi que les établissements publics territoriaux de la métropole du Grand Paris) qui subiront de « fortes pertes de recettes » fiscales et domaniales en 2020. Cette garantie de ressources doit être calculée en comparant ces dernières à la moyenne lissée des trois dernières années (2017, 2018 et 2019) et ne pourra être inférieure à 1 000 euros. Ce dispositif inédit doit donc garantir aux communes et EPCI des recettes fiscales et domaniales au moins égales au niveau moyen de ces dernières années, en prenant en compte les spécificités des outre-mer. Les pertes de recettes tarifaires ne sont, toutefois, pas comptabilisées.
Investissement : 1 milliard d’euros supplémentaires
Ce mécanisme est complété par une augmentation de la dotation de soutien à l’investissement locale (Dsil) d’un milliard d’euros. Celle-ci sera fléchée sur un certain nombre de priorités, telles que des projets contribuant à la résilience sanitaire, à la transition écologique ou à la rénovation du patrimoine public bâti et non bâti. De plus, le texte donne dorénavant la possibilité aux collectivités de financer, grâce à l’enveloppe de cette dotation, des projets en principe couverts par la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR).
Dégrèvement de CFE pour les secteurs fragilisés
Ce budget rectificatif autorise également les communes et intercommunalités à instaurer « une réduction des deux tiers » de la CFE au titre de l’année 2020, l’État prenant à sa charge la moitié du coût de ce dégrèvement. Pour cela, elles devront l’adopter, par délibération, « au plus tard 31 juillet 2020 ». Ce dégrèvement ne peut, toutefois, s’adresser qu’aux entreprises de petite ou moyenne taille (réalisant moins de 150 millions d’euros de chiffre d’affaires) relevant de secteurs « particulièrement affectés par la crise sanitaire » (tourisme, hôtellerie, restauration, sport, culture, transport aérien et événementiel).
Exonération de la taxe de séjour
En outre, et afin de soutenir l’activité de l’économie touristique, les communes et les EPCI pourront également exonérer les redevables de la taxe de séjour, à condition de prendre, là aussi, une délibération d’ici le 31 juillet. Pour la taxe de séjour au forfait, payée par les hébergeurs, la mesure permet aux communes et EPCI de décider d’une exonération totale sur « l’ensemble de l’année 2020 » tandis que, pour la taxe de séjour au réel, payée par les touristes, l’exonération concerne les nuitées effectuées entre le 6 juillet 2020 et le 31 décembre 2020.
Avances remboursables sur DMTO
Pour faire face à la baisse de leurs recettes, les départements pourront, quant à eux, solliciter des avances sur le produit des DMTO à hauteur de 2,7 milliards d’euros, « dont 2 milliards dès 2020 ». Grâce à une clause de retour à meilleure fortune, ils devront procéder au remboursement des avances perçues « qu’à compter de l’année suivant le retour d’un produit de droits de mutation à titre onéreux (DMTO) au moins équivalent à celui de l’année 2019 ».
Dotations : maintien du niveau global en 2021
Parmi les autre dispositions retenues dans ce budget rectifié, on peut retenir l’aide de 605 millions d’euros à Île-de-France mobilités, l’ouverture de crédits à hauteur de 250 millions d’euros pour l’amélioration des moyens de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afift) ou encore « l’extension du FCTVA aux dépenses des collectivités territoriales liées au cloud, (à compter) du 12 janvier 2021 », comme l’a rappelé Laurent Saint-Martin.
A noter qu’Olivier Dussopt a confirmé, devant l’Assemblée, que le gouvernement « reconduir(ait), dans le PLF pour 2021, l’engagement pris dans le PLF pour 2020 de maintenir le niveau global des dotations de fonctionnement ». Celui-ci doit également intégrer le plan de relance de 100 milliards d’euros qui doit être présenté lors du Conseil des ministres du 24 août. Le PLF devrait, quant à lui, être examiné à partir du 12 octobre par l’Assemblée, puis à partir du 19 novembre au Sénat, en vue de son adoption définitive avant la fin de l’année.
A.W.