Le Plan vélo jeté aux oubliettes ?
Depuis la semaine dernière, parlementaires et associations alertent sur la décision du gouvernement de réduire, voire d’abandonner le Plan vélo lancé en 2023 par Élisabeth Borne. Les crédits consacrés à ce plan dans le projet de budget tendent en effet vers zéro.
Explications.
Il faut aller fouiller dans les « bleus budgétaires », c’est-à-dire les très volumineux documents présentant l’ensemble des moyens regroupés au sein de chaque mission budgétaire, pour trouver l’information. Dans le « bleu » de la mission « Écologie, développement et mobilité durable », qui compte pas loin de 500 pages, on trouve quelques lignes consacrées « à la sous-action 44-05 », à savoir « le plan vélo et marche ». Ce plan aura droit à 100 millions d’euros en crédits de paiement en 2025 (contre 145 millions l’année précédente), et, surtout, zéro euro en autorisations d’engagements (les sommes susceptibles d’être engagées pour les années suivantes). Ces autorisations d’engagement étaient de 304 millions d’euros en 2024.
Appels à projets sans réponse
Autrement dit, le gouvernement prévoit bien l’extinction du Plan vélo à partir de 2026. Ce plan, lancé en mai 2023 par Élisabeth Borne, alors Première ministre, prévoyait 2 milliards d’euros sur 5 ans « pour les infrastructures, la sécurité et la formation à la pratique du vélo », avec l’objectif de « doubler le réseau cyclable d’ici 2030 » (lire Maire info du 9 mai 2023). La promesse était claire : 250 millions alloués aux collectivités territoriales chaque année jusqu’en 2027, avec deux appels à projets, dotés de 125 millions d’euros chacun, dont un spécifiquement dédié aux territoires peu denses. Ce deuxième appel à projets (« Appel à territoires cyclables » ), a été lancé le 1er juin dernier, exclusivement réservé aux communautés de communes et d’agglomération. Mais pour le premier comme pour le second appel à projets, aucun lauréat n’a été annoncé à ce jour.
Mais dès le début de cette année 2024, le gouvernement a fait savoir que les crédits dédiés à ce plan étaient « gelés » – ce qui implique que quelque 400 dossiers sont actuellement bloqués, dans l’attente de financements. Les choses ne se présentaient donc pas bien… et la publication du projet de loi de finances pour 2025 n’a fait que confirmer les inquiétudes des associations, avec la réduction des crédits pour 2025 à 100 millions d’euros et la disparition de tout crédit pour les années suivantes.
En commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblée nationale, plusieurs amendements ont été déposés pour rétablir les 250 millions d’euros promis dans le budget de 2025, sans succès.
Le ministre confirme
Est-ce à dire que le gouvernement va « éteindre » le Plan vélo, au nom des économies budgétaires ? On peut le craindre, si l’on en croit le ministre des Transports lui-même, François Durovray, interrogé par une commission du Sénat à ce sujet mercredi dernier.
C’est le sénateur de la Meurthe-et-Moselle Olivier Jaquin qui a interpellé le ministre sur le sujet : rappelant que les 400 collectivités ont candidaté aux deux appels à projets sont « sans réponse de l’État », le sénateur a indiqué que « l’avenir n’est guère plus rassurant, puisque (…) aucune autorisation d’engagements n’est prévue pour le Plan vélo en 2025. Faut-il y avoir une volonté du gouvernement d’éteindre le Plan vélo ? ».
La réponse du ministre (par ailleurs président du département de l’Essonne), ne rassurera ni les associations ni les collectivités engagées dans le développement d’infrastructures cyclables. « L’État ne se désengage pas totalement », a assuré Françis Durovray – tout est dans ce « totalement ». « Il reste, a-t-il précisé, 300 millions dans les Contrats de plan État-régions pour développer les infrastructures. » Mais quid du Plan vélo ? « Je ne méconnais pas la situation que vous évoquez », s’est contenté de dire le ministre, qui s’est dit « ouvert à des discussions » … tout en ajoutant aussitôt que le cadre budgétaire est « contraint », ce qui « nous invite tous à la responsabilité ». Il ressort clairement de cette audition que le gouvernement n’entend pas revenir sur sa décision d’en finir avec les crédits du Plan vélo. François Durovray a tenté de le justifier en disant avoir « entendu des élus locaux » qui jugent que « cette manne [du Plan vélo] est certes bienvenue », mais qui estiment que « l’État est surtout attendu sur les sujets de violence routière, de communication et de sanctions ».
Il n’est pas sûr que les 400 élus des collectivités qui ont candidaté, sans réponse, aux appels à projets, partagent cet avis.