Qui sont Jake et Dinos Chapman ? Des artistes impliqués dans le scandale Balenciaga
Les artistes Jake et Dinos Chapman ont été récemment mêlés au scandale des photos de Balenciaga, la polémique porte sur les images controversées des campagnes de mode et sur les anciens stylistes.
Balenciaga a fait un tollé suite à la publication sur son site Internet d’images de campagnes publicitaires, supprimées depuis, qui montraient des enfants en bas âge tenant les sacs à main en peluche de la marque. Les peluches semblaient être vêtues d’accessoires de bondage, notamment des chemises en résille des harnais et des cols en cuir cloutés.
Des célébrités se sont élevées contre cette représentation. Kim Kardashian, ambassadrice de la marque Balenciaga, a récemment déclaré qu’elle était « dégoûtée » et « secouée » par les images et qu’elle était en train de « réévaluer » sa relation avec la société. Balenciaga a présenté ses excuses pour la campagne et a retiré les images, que certains sur les médias sociaux avaient décrites comme de la « pornographie enfantine ».
Après une enquête minutieuse sur la marque Balenciaga ses collaborateurs et associés, des internautes ont récemment publié sur les réseaux sociaux des images des œuvres d’art des frères Chapman représentant des enfants avec des organes génitaux à la place du nez et de la bouche, provenant du site Web de la maison de vente aux enchères Christie’s.
Christie’s appartient au Groupe Artémis, la holding de François-Henri Pinault. Le multimilliardaire est le mari de la star du cinéma Salma Hayek et président-directeur général de Kering, la multinationale propriétaire de Balenciaga. C’est ce qui a conduit les internautes à établir des liens entre les deux.
Malgré les critiques d’internet, rien ne permet de penser que M. Pinault aurait eu une responsabilité sur les œuvres en question, ou sur tout autre objet d’art, mis en vente sur le site de Christie’s.
Qui sont Jake et Dinos Chapman ?
Nés au Royaume-Uni dans les années 1960, Jake et Dinos Chapman se sont fait connaître dans les années 1990 en tant que membres importants de la génération dite des Young British Artists.
Les artistes plasticiens se sont fait un nom pour leur travail délibérément provocateur et ont été nommés pour le prestigieux Turner Prize en 2003.
Dans une interview accordée à Artimage en 2018, ils ont déclaré à propos de leur travail : « Nous réfléchissons aux conditions de notre expérience, d’abord comme une tragédie puis comme une farce ».
Après des décennies de succès en tant que duo, Jake Chapman a déclaré au Guardian en mai que lui et son frère aîné avaient pris des chemins séparés sur le plan créatif.
« Rien dans notre pratique n’était amical », a-t-il déclaré. « Ce n’était jamais un amour. C’était toujours teinté d’un certain dédain bouillonnant l’un pour l’autre, alors je suppose qu’à un moment donné, on atteint une masse critique et nous avons décidé de prendre des chemins séparés. »
Peter Bradley, alors doyen de la cathédrale de Sheffield, est photographié posant avec une œuvre d’art de Jake et Dinos Chapman, intitulée « Cyber Iconic Man », dans la cathédrale de Sheffield en Angleterre, le 15 septembre 2015. OLI SCARFF/AFP via Getty Images
Parmi les œuvres d’art des frères présentées sur le site de Christie’s qui ont récemment fait l’objet de discussions sur les médias sociaux figurent des représentations d’enfants nus, dont certains sont siamois. Il y a également des représentations de têtes coupées.
Les œuvres des frères sont vendues par Christie’s depuis plus de vingt ans, à des prix allant de quelques centaines de dollars à plus de 500 000 dollars.
Parmi les pièces vendues figure la bande vidéo d’un film pornographique, tourné en 1996, qui montrait des actrices ayant des rapports sexuels avec un mannequin adulte masculin la tête coupée. Elle a été vendue en 2001 pour l’équivalent de plus de 1 300 dollars.
Des images des œuvres d’art ont circulé sur Twitter et Reddit cette semaine, les utilisateurs des plateformes de médias sociaux les qualifiant de « dérangeantes » et « choquantes ».
D’autres ont souligné qu’il était faux d’établir un quelconque lien et ont critiqué les attaques contre Christie’s. Un utilisateur de Reddit a déclaré : « Kering est la société mère de multiples marques de luxe, donc je ne pense pas que le propriétaire milliardaire soit vraiment impliqué dans chacune des campagnes desdites marques. Il n’est pas non plus assis dans le bureau de Christie’s à vérifier les artistes affiliés. Tout ce post ressemble à une théorie de la conspiration Q ».
Un autre a dit : « Vous pouvez détester Jake & Dinos autant que vous voulez, mais Christie’s n’a vraiment rien à voir avec eux ou avec ce qu’ils essaient de faire avec leur art. »
Newsweek a contacté des représentants de Christie’s et des Chapman pour obtenir des commentaires.
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La mode des années 1990-2000 : du porno chic tapageur au sobre raffinement
De la robe transparente toute en filets de pêche de Martin Margiela au bustier en jean brodé de plumes d’autruche de Jean Paul Gaultier, l’exposition sur la mode des années 1990-2000 aux Arts décoratifs, qui ouvre jeudi, retrace la créativité débridée des deux dernières décennies.
Après la festivité des années 1970 et la théâtralité des podiums dans les années 1980, « la décennie 1990 est celle de la maturité, de la professionnalisation », souligne l’historien de la mode Olivier Saillard, actuel directeur du musée Galliera qui a été l’un des commissaires de l’exposition parisienne.
La mode devient une industrie et « être créateur signifie dès lors être aussi chef d’entreprise et se donner une vie à long terme », explique-t-il à l’AFP.
Les années 2000 sont ensuite marquées par la gravité des événements politiques, 11-Septembre, catastrophes climatiques et crise financière : La mode se fait plus discrète, économe et contrôlée.
Pour autant, ces années sont aussi « porteuses de surprises, avec l’émergence notamment de Nicolas Ghesquière chez Balenciaga ou Alber Elbaz chez Lanvin, qui ont montré qu’il peut y avoir un luxe raffiné et expérimental qui n’est pas synonyme d’impérialisme et d’arrogance », commente le commissaire.
Ces créateurs exercent leur métier de manière « plus noble et plus honorable » que les excès tapageurs et « trop voyants » du luxe porno-chic de la décennie précédente, juge-t-il. « On revient à la sophistication, à une recherche sur le vêtement qui n’est pas que de l’image », ajoute-t-il.
Cent cinquante modèles, sélectionnés parmi les collections les plus emblématiques, sont présentés aux côtés de nombreuses vidéos de défilés, pour retranscrire l’univers de créateurs répartis en plusieurs écoles stylistiques : belge, anglaise et japonaise notamment.
Les volumes étranges de Rei Kawakubo, créatrice de Comme des Garçons, côtoient le faste et la provocation d’Alexander McQueen —et son défilé choc de 2004, pastiche du film « On achève bien les chevaux » à l’énergie cruelle— ou de Vivienne Westwood.
La haute couture, qui « reprend du sang neuf à la fin des années 1990, en devenant un enjeu de communication pour les maisons », est très présente avec les modèles de Karl Lagerfeld pour Chanel, John Galliano pour Dior, Jean-Paul Gaultier ou Christian Lacroix.
Le singulier Azzedine Alaïa, « énorme talent » qui défile en dehors de tout calendrier, expose une seule robe, un fourreau bleu ciel : « On dirait une sculpture, cette seule robe suffisait. Rien ne sert de créer 100 robes, encore faut-il créer la bonne ! », commente M. Saillard, pour lequel il y a aujourd’hui « trop de défilés, trop de mode et pas assez de créateurs ».