Si World Rugby, fédération internationale propriétaire de l’événement, a réalisé en 2023 le meilleur résultat financier de son histoire (proche de 500 M€), les ressources laissées en héritage pour le développement du rugby en France sont quasi nulles voire négatives et, en tout état de cause, bien en-deçà de l’objectif de 68 M€ avancés lors de la candidature.
Le compte final du GIE arrêté en juillet 2024 s’élève en effet à 229 M€ en recettes et 249,6 M€ en dépenses, soit un déficit opérationnel de - 20,6 M€. Après imputation de provisions pour contentieux commerciaux et fiscaux (15,1 M€), le résultat final s’établit à - 35,7 M€.
La responsabilité de la FFR comme celle de l’État dans les résultats financiers de la Coupe du monde de rugby sont dès lors fortement engagées, du fait d’un contrôle défaillant de leur part de la gestion du GIP comme de celle du GIE.
Le rapport est ici
Claude Atcher, ancien directeur général du groupement d’intérêt public (GIP) France 2023 a été mis à pied puis débarqué par le conseil d’administration. Il a été remplacé par Jacques Rivoal qui assurait en janvier 2023 : « On a pour la première fois fait un travail de transparence pour présenter un résultat complètement consolidé. Ce que je peux vous dire, c’est qu’on sera à même de présenter un résultat qui sera au niveau des meilleurs benchmarks dans l’histoire des Coupes du monde ».
Virer l’ancien directeur du GIP pour trafic d’influence et corruption pour le remplacer par Rivoal qui a présenté une note salée avec une perte de 35 millions d’euros est un fiasco.
Quelque soit l’organisation des évènements sportifs comme les Jeux Olympiques ou la Coupe du Monde de Rugby, les organisateurs ont couté des millions voir des milliards aux contribuables sans que l’Etat n’intervienne pour assurer un contrôle financier.
Mais si l’on regarde depuis le début de cette histoire, le vrai problème est un caprice du pouvoir.
La France a payé très cher d’avoir fait une folle enchère pour obtenir la Coupe du monde. Selon la presse Anglaise et le London Times, la candidature française l’a emporté sur celle de l’Afrique du Sud, parce que la France « avait le plus gros carnet de chèques ». Pour rafler la compétition, la France s’était engagée à reverser de manière ferme et irrévocable 407 millions d’euros à la World Rugby. ( 171 millions pour s’acquitter des droits d’organisation et 236 millions correspondant aux engagements en matière de frais d’organisation du tournoi )
En janvier 2017, la Fédération Française de Rugby, avec à sa tête Bernard Laporte, a confié, moyennant un contrat de 120.000 euros, le montage de la candidature à Score XV, la société de Claude Atcher. Ce dernier a mobilisé une quinzaine de sociétés facturant leurs services à la Fédération. Le budget du dossier France 2023 était de plus de 700.000 euros, selon le journal le JDD.
L’Inspection Générale des Finances a été chargée avec l’inspection générale de la jeunesse et des sports d’évaluer les conditions d’organisation en France de la coupe du monde masculine de rugby de 2023, remportée par la fédération française de rugby (FFR) le 15 novembre 2017.
Emmanuel Macron a conduit la délégation française à Londres le 25 septembre 2017 pour la soutenance du dossier français devant le Conseil de World Rugby.
« Cet engagement traduit le soutien du Président de la République à la candidature de la France pour l’organisation de la Coupe du Monde 2023 » avait déclaré Bernard Laporte, Président de la Fédération Française de Rugby.
La World Rugby a exigé de chaque candidat une garantie de l’État. le 21 juillet 2017, la Caisse des dépôts et consignations a reçu une lettre signée par le ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, rédigée au nom du gouvernement, lui demandant, dans le cadre de ses missions d’intérêt général, d’accorder à la FFR une garantie de 171 millions d’euros.
Toujours selon le JDD, la direction générale de la Fédération est intervenue rétroactivement auprès de Cyril Mourin, le conseiller sport d’Emmanuel Macron. Le paiement de la commission (424.000 € pour la période du 15 novembre au 31 décembre 2017) a ainsi été différé du 28 août au 15 novembre, jour de la désignation du pays hôte. Son montant serait revu à la baisse dès lors que la garantie se trouverait directement reprise par l’État. Une issue plausible puisque le gouvernement envisage de l’intégrer au projet de loi de finances 2018.
COUR DES COMPTES 08.04.2025
La Coupe du monde de rugby a été un incontestable succès populaire, médiatique et sportif. La progression de 15 % du nombre de licenciés de la FFR et l’effet positif de cette compétition sur l’image de la France grâce à une organisation sans incidents notables renforcent son bilan bilan positif. Cependant, des dysfonctionnements ont conduit à des choix stratégiques hasardeux qui ont entraîné des pertes substantielles pour le comité d’organisation et, en conséquence, de moindre ressources laissées en héritage pour le développement du rugby en France.
Si World Rugby a réalisé le meilleur résultat financier de son histoire et si le résultat de « France 2023 », strictement limité à l’organisation de l’événement, est également le meilleur jamais enregistré par les comités d’organisation de la Coupe du monde de rugby, les pertes enregistrées sur « Campus 2023 » et sur le GIE « Rugby Hospitalités et Voyages » ont réduit ce résultat de moitié voire des deux-tiers, la FFR enregistrant pour sa part une perte sèche a minima de 19,2 M€ et pouvant atteindre jusqu’à - 28,9 M€, alors même qu’elle était déjà en difficulté financière sur les derniers exercices et soumise à une exigence de maîtrise renouvelée de ses dépenses. Ce résultat alarmant our la FFR qui, en 2007, avait bénéficié de 33 M€ de crédits pour financer le développement de son sport, tient pour l’essentiel aux engagements inconsidérés pris pour obtenir le droit d’organiser cette manifestation et à une forme d’insincérité des révisions budgétaires annuelles, ainsi qu’à la multiplication de projets supposés permettre d’accroître le résultat final.
Le présent rapport émet en conséquence à l’attention des pouvoirs publics des recommandations pour que cette situation ne puisse à l’avenir se reproduire dans l’organisation des principaux grands événements sportifs internationaux.












